Mes 3 dates les plus foirés

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Vous ne rêvez pas… C’est bien un second article en moins de dix jours.

Mais la raison qui justifie ces deux articles rapprochés est que je tenais à poster celui-ci le 14 février, pour pouvoir vous parler d’amûûûr !
Enfin amour est un bien grand mot puisque ce n’est jamais allé jusque là, mais au moins de rencontres. Et histoire de consoler tous les célibataires tristounes en cette journée bien commerciale, de rencontres qui ont fait un gros flop.
Encore une fois je me dévoue pour mon public, et vous propose de rire de mes malheurs.
Alors non, je ne repars pas sur un nouveau chapitre du manuel du petit ami Japonais ni sur une autre explication de comment se fête la Saint Valentin à l’autre bout du monde, mais on va quand même parler de déboires amoureux, parce qu’on aime bien quand tout tourne en eau de boudin. (Avouez que si y’a bien UN sujet où on s’identifie tous à un moment donné, c’est bien celui des histoires foirées…)
Comme je n’ai aucune pudeur et que je vous ai déjà déballé toute ma vie amoureuse dans Mes Histoire d’A., vous savez déjà que Cupidon m’a carrément boudée – voire brimée – pendant plusieurs années, et que les fées de la romance ne s’étaient pas spécialement penchées sur mon berceau.
Bon, on dirait que ça s’est un peu arrangé maintenant, mais on est clairement pas là pour parler de choses heureuses – boriiiing – donc revenons plutôt sur d’autres échecs afin de faire travailler un peu vos zygomatiques.

Aujourd’hui, je vous propose de revenir sur le top de mes meilleurs flops en plein date ! Car avant de subir vivre mes histoires d’amour nazes, il y a aussi eu des rencontres et des rencards tout aussi nazes.
Après je ne vais pas vous parler de dates ratés lambda, où on a rien à se dire ou encore où la personne ne ressemble pas à ses photos ou autres… Ça, c’est du réchauffé qu’on voit partout. Non, je vous ai choisi juste les plus cocasses. Ceux dignes de moi, quoi.

Si vous avez lu Mes histoires d’A., vous savez que j’ai eu une longue traversée du désert de trois ans, entre mon départ de Corée en 2013 et l’automne 2016.
Si la première année ce célibat était choisi, les deux années suivantes ont été un peu longues, un peu désespérées, et un peu en quête de trouver quelqu’un avec qui adoucir ce morne quotidien.
Sauf qu’entre temps, j’avais commencé ma vie d’indépendante en télétravail, c’est à dire à bosser seule à la maison… Alors si vous aviez lu ce blog il y a un an, vous auriez peut-être pas vraiment vu le souci, mais maintenant que la moitié de la planète est en télétravail à la maison, je pense que tous les célibataires visualisent bien la problématique sous-jacente. Oui, niveau nouvelles rencontres, c’était plutôt limité.
C’est donc isolée et en mal de nouvelles rencontres, surtout après mon arrivée en Australie, qu’en 2014, je suis les conseils d’autres amies célibataires qui me vantent les mérites d’une appli de rencontres « super » qui commence à devenir célèbre : Tinder.

 

Et c’est ainsi qu’entre 2014 et 2016, j’entame ma longue traversée du désert sur l’enfer de cette application… pour décrocher quelques belles anecdotes saugrenues.
Voici donc rien que pour vous mesdames et messieurs, le récit de mes trois plus beau rendez-vous qui ont fini en naufrage !
Ambiance topito, c’est parti !

Top 3 : Quand Pierre Richard drague à la plage

Nous sommes fin 2014, et je suis à Sydney depuis déjà quelques temps. Cela fait plus d’un an que j’ai quitté la Corée du Sud et que je digère ma dernière relation (autant vous dire que ça ne se passe pas sans reflux acides), et je commence à avoir naïvement envie de redonner une chance à la gente masculine.
Toutefois, il convient de préciser que si je n’ai jamais été une grande séductrice de base, ma dernière relation de l’époque m’avait bien amoché l’estime de moi-même, déjà pas bien haute d’ordinaire… Aussi, je me remettais sur le marché de la drague avec à peu près cette assurance :

 

Assez vite, je tombe sur Alphonse (toutes mes rencontres seront renommées avec grand soin).
Il a le même âge que moi, il est plutôt gentil et surtout ce que j’aime bien chez lui, c’est qu’il est comme moi : il n’assume pas tellement d’être sur Tinder, n’est pas hyper sûr de lui et dit «  juste vouloir se faire des amis ».

Du coup, on prend notre temps pour faire connaissance. Il est plutôt gentil, et comme il est également en Australie pour un working holidays depuis un peu plus longtemps que moi, il me parle beaucoup de ses expériences et de la vie à Sydney.
Après un laps de temps qui nous paraît raisonnable, on se rencontre une première fois pour un restaurant de son choix. Tout se passe plutôt bien, il est assez fidèle à ce qu’il était par écrit : gentil, simple et avenant. Je n’ai pas de coup de foudre mais pas de coup de massue non plus, il est plutôt cool.  Et ça semble être pareil de son côté.
Au pire si la magie n’opère pas, ce n’est pas grave, j’aurai en effet trouvé un ami, et quand on vient d’arriver dans un nouveau pays, ça reste très précieux.
Mais ce n’est pas de ce rencard là dont je vais vous parler, car pour tout avouer il était relativement banal et tranquille, j’ai le souvenir d’un moment sympa avec rien de spécialement notable.
C’est après que ça devient n’importe quoi.

Donc pas de gros coup de cœur à la première rencontre, mais pas désagréable non plus. Nous continuons donc à discuter et à nous voir régulièrement autour d’un verre ou d’un repas de manière tout à fait platonique pendant quelques temps. Petit à petit nous devenons de plus en plus proches.
Jusqu’à ce qu’il m’invite finalement à un après-midi un peu plus romantique : balade au bord de la mer de plages en plages, de Bondi Beach à Coogee Beach. C’est une promenade dans la banlieue de Sydney, et si je ne l’ai encore jamais faite, on m’en a déjà parlé et je sais que le chemin est parfaitement aménagé pour les promeneurs.
Aussi, j’en profite pour sortir mes habits de lumières : petite robe et chaussures de ville mignonnes… pas spécialement tout terrain.
(Je vous vois commencer à sourire avec sadisme en imaginant la suite.)

Nous prenons le bus avec Alphonse, prenons un déjeuner et une bonne glace sur Bondi Beach avant de commencer notre petite balade.
En effet, tout est aménagé et le chemin est plutôt agréable :

Le temps est magnifique, le paysage superbe, on discute plutôt bien… Je sens même son intérêt pour moi grandir, ce qui me trouble un peu… Bref.

Sauf qu’au cours de la ballade, Alphonse remarque que les gens sont sortis du chemin aménagé pour aller crapahuter sur les rochers…

Ce qui lui donne évidemment l’idée de faire comme tout le monde.
Sauf que moi, non seulement je ne suis absolument pas chaussée pour, mais en plus j’ai un centre de gravité qui saisit la moindre occasion de me trahir depuis mon plus jeune âge et en qui je n’ai absolument pas confiance !
Non vraiment, c’est assez impressionnant comment j’ai la gamelle facile, alors je ne vois pas d’un très bon œil toute cette roche érodée.

Mais comme je sais qu’objectivement faire trempette dans l’eau c’est cool, que je n’ai pas envie d’être rabat-joie, et qu’à première vue, ce n’est quand même pas aussi tortueux que ça, je me prête volontiers au jeu.

Mais… Même avec toute la bonne volonté du monde, Pierre Richard reste Pierre Richard. Surtout qu’Alfonse est plus ambitieux que les autres promeneurs et décide de faire toute la côte sur les rochers, jusqu’à la prochaine plage… On quitte très vite le plat pour un bordel de roches sans nom. Il y a des trous gorgés d’eau de mer dans la roche où de la mousse traître et glissante s’est formée, et à force de dérapes incontrôlés, je comprends très vite que le sol ne sera pas mon allié dans cette aventure.

Je tremblote sur mes jambes, tenant fébrilement mon réflex en main, consciente que je suis en train de perdre terriblement en glamour et séduction à avancer laborieusement, faisant régulièrement des moulinets avec mes bras pour éviter de m’exploser sur les rochers.
Et alors qu’Alfonse gambade gaiement avec la légèreté et l’aisance d’un mouflon sur les falaises, moi je me sens comme un rhinocéros sur des skis.
A ce moment-là, mon niveau de confiance en moi est redescendu bien bas dans les tréfonds de la balourdise.

Mais Alfonse n’est pas un goujat.
Il voit bien que je suis en galère finie sur les échasses incertaines qui me servent de guiboles et c’est ainsi que, grand chevalier prêt à venir au secours de sa dulcinée incapable de mettre un pied devant l’autre… Il me tend la main.

Son regard est intensément plongé dans le mien, nos cœurs palpitent à l’unisson, chaque battement rythmé par le bruit des vagues, un rayon de soleil illumine son sourire doux…
J’observe l’expression de son visage qui m’invite à mettre ma main dans la sienne, pour sceller ce premier rapprochement physique entre nous…

C’est donc tout naturellement que… je panique ET LUI FOURRE MON SAC À MAIN DANS LA MAIN.

 

C’est un coup de théâtre ou je ne m’y connais pas.

Je n’ai aucune idée de ce qu’il m’a pris.
J’ai juste paniqué.
Vous avez déjà vu ce genre de films ou roman à l’eau de rose où l’héroïne a juste UN BOULEVARD devant elle pour pécho le mec, et qu’elle fait n’importe quoi par pure connerie ?
A chaque fois, on ricane grassement en disant « Mais n’importe quoi, personne réagirait de façon aussi débile dans la vie ! ».
Ben je vous jure que si. J’en veux pour preuve, l’héroine débile qui fait n’importe quoi, ce jour-là, c’était moi.

Je ne sais pas, en un quart de seconde tout a défilé dans ma tête : « Han, mais il m’invite à lui prendre la main, là non ? C’est une ouverture au rapprochement ? C’est un premier pas ? Ça veut dire qu’il est intéressé par moi ? … Ouais non, mais imagine que non… Imagine qu’il tend juste la main pour t’aider car tu es chargée avec ton sac, l’appareil photo et que tu es mal chaussée sur un chemin glissant… Si ça se trouve, il veut juste aider vite fait par bonté d’âme, et toi tu lui prends la main, et le mec est genre super gêné de se retrouver dans ce traquenard. GROS MALAISE. Non, je peux pas risquer ça. En fait, il veut juste m’aider car il voit que je galère de fou, ça veut pas dire qu’il veut qu’on se balade main dans la main… Non bah je vais lui tendre mon sac à main, c’est plus sûr. »
Voilà, ça s’est passé en un flash, mais c’est grosso merdo ce qui se passe dans la tête d’une meuf pas sûre d’elle et avec peu d’expérience dans ce genre de cas.

Alors qu’EVIDEMMENT c’était un premier pas pour se rapprocher et qu’EVIDEMMENT il s’est retrouvé comme un con, en brave chevalier soudain rétrogradé bagagiste avec mon vieux sac à main sur les bras à se coltiner au lieu de la douce balade main dans la main qu’il avait en tête.
En une seconde, en voyant l’effroi dans ses yeux, j’ai compris mon erreur.
M’aider à porter mes affaires, il s’en battait royalement les grelots.
Il m’avait vue en détresse et avait logiquement vu là une occasion en or de se rapprocher de moi.
Bien joué, l’artiste.

Mais digne, Alphonse accepte mon sac à main sans broncher, qu’il a porté fièrement en reprenant sa cavale maîtrisée sur les rochers tandis que je continuais à trembloter sur mes jambes mal assurées. (Et non, ce n’était même pas mieux sans les chaussures, être nulle est tout un art vous savez.)
Ceci dit, autant vous dire que son ego avait quand même pris cher avec ce vent magistral, et qu’un petit silence c’était installé entre nous.
Alphonse devait ruminer mon rejet, pendant que je me maudissais d’avoir le QI d’une huître en séduction.

Nous continuons toutefois – à mon plus grand désarroi – notre balade hors piste sur les rochers, et Alphonse bien plus à l’aise que moi et ne cherchant plus du tout à se rapprocher… marche d’un pas assuré devant moi, tandis que je peine à le suivre.
On arrive au bout, mais le passage se fait plus étroit, couvert de mousse glissante, et je continue de m’accrocher à la housse de mon réflex – que j’ai maintenant rangé – en espérant ressortir de cette balade indemne.
Sauf que… Encore une fois, le sort ne m’est pas favorable (rappelez-moi de ne jamais participer aux Hunger Games). Alors que je m’apprête à bientôt sortir des rochers pour reprendre le chemin normal… Une immense vague me prend en traître par derrière, et me propulse sur le rocher devant moi où je m’étale comme une crêpe.

Reconstitution de la scène :

Si près du but quand même, c’est moche.
Je vous rassure, entre la housse et sa coque tropicalisée, le réflex a survécu (sinon vous n’auriez pas ces photos…). Mais mon genou, lui, est mort dans la bataille.
Je dérape sur la mousse pour me relever, bois un peu la tasse, j’ai le genou en feu… Et quand je relève la tête, je vois le visage absolument dépité d’Alphonse.
Je me jure intérieurement que si cette fois il me tend la main, je m’y accrocherai comme une moule à son rocher. Mais vous vous doutez bien que cette fois il s’en garde bien.
Et comme je suis une chiffe molle, je n’ose évidemment pas le faire moi.

Il vient quand même voir si ça va, s’inquiète pour mon genou un peu amoché… Et me propose gentiment de retourner – ENFIN ! – sur le chemin aménagé, car il le comprend seulement maintenant, la Sonyan n’est pas tout terrain.

Je boîte, je suis fatiguée, je saigne, Alphonse s’en veut de m’avoir emmenée là… Alors au lieu de finir la balade jusqu’au bout, on se pose sur un banc pour admirer les surfers.

Enfoirés d’Apollons dotés d’un centre de gravité fiable.

Je m’en veux d’avoir tout gâché avec ma maladresse et mes réactions à côté de la plaque, que je suis un peu plus silencieuse qu’avant.
Alphonse, peut-être ruminant ce rencard raté, n’est pas plus bavard.

Nous rentrons finalement clopin-clopant au centre de Sydney, et je retourne chez moi reposer mon genou amoché, l’image de moi qui lui fourre mon sac à main sur les bras tournant en boucle dans ma tête.

Interlude : Le Christian Grey de Hong-Kong

Alors je ne classerais pas ce date dans le top 3 des flops car en vrai j’avais passé un bon moment, mais une de mes rencontres les plus cocasse a eu lieu à Melbourne, environ 4-5 mois après Alphonse.
J’avais matché avec un bel éphèbe, encore une fois en working holiday comme moi, tout droit venu de Hong-Kong.
Après quelques échanges, on se donne rendez-vous dans le centre de Melbourne, près de la rivière Yarra, pour nourrir les cygnes noirs et se promener dans le jardin botanique.
Le jeune homme me demande quels sont mes hobby… Je lui réponds simplement « lire, écrire, les voyages et les concerts »… Bref, rien de bien original, que de nombreuses personnes auraient pu répondre à ma place.
Et en toute logique, je lui retourne la question : « Et toi ? ».
Et là, monsieur me répond avec un naturel déconcertant « piloter mon avion ou mon bateau.».

Je me souvenais avoir vu une photo de profil où il était sur un yacht mais ne pas en avoir vraiment pris note : j’ai pris ça pour des photos de vacances.
Or le jeune homme, que nous renommeront Jean-Hyppolyte, m’avoue soudain qu’il est en fait le fils d’un grand homme d’affaires de Hong-Kong, qu’il en avait marre des pressions liées à son statut social et à la vie mondaine, et qu’il a réussi à négocier une année sabbatique en Australie avant de reprendre ses obligations et l’affaire familiale. Aussi, est-il là pour profiter de sa liberté et de rencontres « normales » avant de reprendre sa vie de grand héritier.
Un prince à New York version Australienne, quoi.

Pour prouver ses dires – même si je n’ai rien demandé – Jean-Hyppolite me montre des photos de sa vie et sa famille à Hong-Kong… Et en découvrant sa vie faites de déplacement en jet privé et de rolex, je me retrouve tout droit propulsée dans un drama.
Je me vois déjà, moi pauvre roturière, être prise en grippe par sa famille, survivre à maints obstacles car nos mondes sont trop différents, me faire kidnapper par le chef de l’entreprise adverse pour faire pression sur lui, subir un shitstorm médiatique où je me fais harceler par les paparazzi hongkongais… Pour finalement obtenir un happy end dans un aéroport –où le mec sera venu me retrouver en courant, crachant ses poumons au lieu de prendre les transports comme tout le monde – suivi d’un mariage digne de celui des Windsor avec sa famille qui aura finalement reconnu mes valeurs, malgré mes origines modestes et mes mauvaises manières.
Mon avenir est tout tracé, je le sens.

Mais notre jeune milliardaire avait d’autres projets en tête : il avait envie de goûter aux joies du pauvre peuple et me trouvait toute indiquée pour ça… (Merci…?)
C’est donc ainsi qu’il m’invite généreusement à aller manger dans un fast-food chinois où il m’a payée des nouilles à 5 dollars dans le food court d’un centre commercial au milieu de lycéens.
Il n’arrêtait pas de s’émerveiller devant son bol de nouilles bon marché, fier d’être un rebelle envers sa famille et de s’encanailler avec une fille du peuple.

Régulièrement quand on se baladait dans la rue, il regardait les appartements hors de prix à vendre dans des tours flambantes du centre de Melbourne, appelant son père pour le rencarder sur les biens sympa où investir…
Au final, pour quelqu’un qui voulait s’intégrer aux « gens normaux » et oublier sa vie d’héritier l’espace d’un an, je réalise avec le recul qu’il remettait tout le temps sa richesse et son statut social différent sur le tapis alors que j’en avais un peu rien à secouer.

Bref, dans les films les nanas qui tombent sur un milliardaire finissent par vivre la vie de château… Moi j’ai eu des nouilles de fast-food dans un centre commercial pour divertir Sa Majesté.
J’imagine qu’on a les contes de fées qu’on mérite.

Top 2 : Alphonse contre-attaque

Un top trois de mes dates foirés, et on retrouve la même personne dans deux d’entre eux… Il faut se rendre à l’évidence : quand ça veut pas, ça veut pas…
Parce que malgré ce premier rendez-vous « romantique » raté, ça n’a pas sonné le glas de la fin des haricots entre Alphonse et moi. Le revoilà donc pour un second épisode.
Une fois rentrée et reposée, j’ai voulu recoller les pots cassés en l’invitant à passer la soirée en face de chez moi à Darling Harbour, un quartier portuaire de Sydney avec de nombreuses attractions, magasins… et des feux d’artifices tous les samedi soirs.
Quoi de plus romantique que des feux d’artifices ?

Alfonse accepte volontiers.

Motivée à nous redonner une chance, je propose même à Alphonse de passer me chercher à la maison avant.
En effet, c’est son anniversaire et je sais qu’il n’a aucun proche avec qui le fêter, alors j’ai préparé un petit gâteau maison pour lui.
En attendant qu’il arrive, je m’occupe des tâches ménagères, notamment ma lessive.
Il sonne au moment où je sors mes vêtements du sèche-linge, alors je m’empresse d’aller tout déposer sur mon lit dans ma chambre avant d’aller lui ouvrir.

Je lui offre son gâteau, avec bougies et un « Happy Birthday to you » mal chanté en bonne et due forme. Il est terriblement touché, et on déguste une petite part avec un verre avant de sortir profiter de Darling Harbour.
Il ne s’attendait vraiment pas à ce que j’ai préparé quelque chose pour lui et de mon côté je suis contente de lui faire plaisir.
Sans même chercher à séduire, je sais après bien des années d’expatriation, que la moindre attention peut faire mouche quand on se retrouve loin de ses proches pour son anniversaire, Noël ou autre événement à partager.

Après ce petit moment mignon qui rattrape un peu l’échec du précédent rencard, je pars rapidement prendre une veste parmi les vêtements propres que j’ai déposés sur mon lit, et on descend profiter du port.
On se promène le long de Darling Harbour éclairé de ses milles et un néons, entre prestations des artistes de rue, discussions et shopping.
On part déguster les meilleurs fudges de la ville après s’être enquillé un gâteau d’anniversaire maison, histoire d’être sûrs d’éviter la crise d’hypoglycémie.
On est jamais trop prudent.

Puis vient l’heure des feux d’artifice :

(Aperçu des feux d’artifices vus de ma chambre chaque samedi)

Encore une fois, le cadre est plutôt sympa.
Nous sommes assis parterre, côte à côte au bord de l’eau, mollet contre mollet, les yeux levés au ciel pour admirer l’explosion de couleurs au dessus de nos têtes.
Qu’est-ce qui pourrait bien foirer cette fois ? Aucun caillou glissant ou méchante vague à l’horizon !

Une fois les feux d’artifice terminés, on se relève et on s’apprête à repartir se promener quand une dame me tape sur l’épaule et me dit « Tenez, je crois que c’est à vous… »

Et là elle me tend du bout des doigts, un peu dégoutée… Une culotte.

Admettez que j’ai toujours le don de vous surprendre avec mes coups de théâtre complètement sortis de nulle part.
Moi-même j’en reste comme deux ronds de flan.
Car le fait est que… je la reconnais cette culotte, elle est bien à moi.
Une petite culotte nœuds rouges, un peu tâchée et un peu déchirée… Parce qu’elle fait partie de mon commando spécial indisposition féminine (traduction pour les nazes : je la garde pour les périodes de règles, parce que je m’en fous de l’abimer au reste).
Je me retrouve donc en pleine rue, face à mon rencard et une parfaite inconnue qui me tend du bout des doigts une des culottes LES PLUS FLINGUEES de mon placard.

Mais… POURQUOI ?
Pourquoi je me mets toujours dans des situations pareilles ? Comment c’est même possible d’ailleurs ?
Parce que… qu’est-ce qu’elle fout là, cette culotte ?! Comment est-elle arrivée dans les mains de cette dame ?!
Perdue, je tente un regard en coin à Alphonse qui reste interdit. Il observe d’un air suspicieux la culotte miteuse, puis se tourne pour scruter mon visage… et enfin ma jupe en fronçant les sourcils.
Ne me dites pas que… Il pense que j’ai enlevé ma culotte pendant les feux d’artifice ?!
Au mieux, il se demande juste si je mets réellement des sous-vêtements aussi misérables.

Je panique et fais donc ce que toute honnête femme ferait à ma place : JE MENS ÉHONTÉMENT.
« Ah non non, vous faîtes erreur, cette culotte n’est pas à moi… »

Mais malheureusement, la dame insiste : « Vous êtes sûre… ? »
Je fais mentalement mes adieux à cette brave culotte que je ne reverrai sûrement jamais après cela : « Oui, certaine. »

Mais notre commissaire des objets-trouvés est intraitable « Pourtant vous venez tout juste de la faire tomber. »
Ma dignité :

Toutefois, c’est à ce moment-là que je comprends.
Mes vêtements… Je les ai sortis en vrac du sèche-linge quand il est arrivé à la maison et je n’ai pas pris le temps de les ranger. Avant de partir j’ai pris une veste dans le tas pour ne pas avoir froid… Et la culotte devait être coincée dans la capuche ou que sais-je… Donc quand je me suis penchée pour me relever à la fin des feux d’artifice, elle est tombée de ma veste.
Un éclair de compréhension passe sur mon visage… et il ne passe pas inaperçu devant la dame qui ne me quitte pas des yeux.
Je mens, elle sait que je mens – de toute façon elle a vu cette culotte sortir de ma veste – et Alphonse… Bah Alphonse il a l’air un peu à perdu et il suit cet échange lunaire avec un froncement de sourcil perplexe.

Aujourd’hui je pense que j’en aurais rien à secouer et je prendrais la culotte en rigolant, mais à l’époque, je n’ai absolument pas assumé cette culotte du pauvre trouvée dans la rue.
Du coup, rouge de honte, je nie à nouveau.

Cette fois la femme n’insiste pas et part déposer du bout des doigts la culotte dans une poubelle – peut-être a-t-elle cru qu’on avait fait des folies dans une ruelle et que je n’avais pas remis mes sous-vêtements ensuite, mais je ne veux pas le savoir…
Quant à Alphonse, il semble dubitatif concernant la scène qui vient de se dérouler mais ne pose pas de question.

Je passerai le reste de la soirée à me demander pourquoi le sort s’acharne, ce qu’a pensé cette brave dame de moi, les doutes et les suppositions d’Alphonse sur cette culotte…

Au final – car je sais que vous êtes de gros curieux et que vous vous posez la question – il ne s’est jamais rien passé entre Alphonse et moi.
Au premier abord il était gentil et plutôt cool… Mais le fait est que je n’avais pas vraiment de coup de cœur, et qu’à long terme, certaines choses me déplaisaient profondément chez lui donc nous en sommes restés là…
Mais ces souvenirs de rencards maladroits dignes des comédies romantiques les moins inspirées me font toujours sourire des années après.

Interlude : le date le plus court de l’histoire

Je suis à Melbourne, quelques mois ont passé depuis Alphonse, et cette histoire se passe avant ma rencontre avec Jean-Hyppolite l’héritier rebelle des fast-food.
L’heureux élu de cette histoire s’avère être ma première rencontre sur Melbourne et portera le doux nom de Barnabé. On match, on discute un peu pendant quelques temps.
Finalement on propose de se voir, et on se donne rendez-vous en plein centre ville, devant la cathédrale Saint-Paul de Melbourne. On n’a pas prévu de sortie en particulier, mais il y a plein de cafés et restaurants dans le coin, je sais qu’on trouvera toujours un truc sympa à faire.
A l’heure dite, je vois arriver le jeune Barnabé et on se salue timidement.
Puis il enchaine directement en disant : « Allez viens, ma voiture est garée par là. »
Je me fige.
« Heu, comment ça, ta voiture ? Désolée on ne se connaît pas, je préfère éviter de monter directement en voiture avec toi.
-Mais… On va pas chez moi pour niquer ? »

Je réponds donc en toute candeur « Ben… non ? »
– Mais tu voulais faire quoi alors ?!
– Ben je sais pas… Je pensais manger un bout, boire un verre, discuter… faire connaissance, tout ça… ?
– Oh… Alors on s’est mal compris, moi je voulais juste niquer.
– Ah oui, en effet, on s’est mal compris.
– Wouah… Je suis désolé pour ça.

Et c’est ainsi que Barnabé s’est galamment excusé pour sa goujaterie, m’a souhaité une bonne soirée quand même, a tourné les talons et s’est barré sans demander son reste, sûrement déjà en quête d’une remplaçante suite à mon désistement impromptu.

Durée du rencard : trente secondes chrono.
Barnabé n’a pas le temps, il n’est pas là pour enfiler des perles. Ça valait bien le coup de se donner rendez-vous devant la Maison de Dieu, sombre pécheur.
Mais au moins, il n’a été ni insistant, ni impoli. Merci Barnabé, et bonne bourre continuation à toi.

Top 1 : Le Bel au bois dormant

Nous y voici, le top 1.
Clairement le rencard le plus surréaliste que j’ai jamais vécu. Et vous connaissez mon niveau.
En toute honnêteté, pour les top 3 et 2… C’est surtout le côté loufoque de mes maladresses qui me font rire après coup et qui font que j’ai retenu ces anecdotes plus que d’autres.

Bref, jusque là, c’était donc des petits fails rigolo, mais rien de si terrible finalement.
Que pour ce top 1, on part dans l’épique, le légendaire… le sonyesque.

Un an et demi se sont écoulés depuis Alphonse, Barnabé et Jean-Hyppolyte. Toujours aucune amourette à l’horizon.
J’ai délaissé les applications depuis déjà un bon moment, le temps de parcourir l’Australie (après Sydney et Melbourne, ça n’avait pas d’intérêt pour moi puisque j’étais toujours en mouvement), rentrer en France… puis revenir au Japon.
Mes premiers mois au Japon passent vite, entre ma réinstallation, les retrouvailles avec les amis, le travail, les projets… Les rencontres ne sont donc pas ma priorité dans un premier temps.
Mais le fait est que ça fait maintenant trois ans que je suis célibataire et que ça commence à me peser vraiment lourdement.
Alors je décide de retester Tinder au Japon (et ça vaut son pesant de cacahuète niveau profils).

Sauf que… j’ai changé.

Je vous disais dans le chapitre 2 du Manuel du petit ami Japonais que j’abandonnais et que je laissais ma place aux autres. Des années plus tôt, je m’étais déjà lassée des rencontres codifiées à la japonaise, des premières semaines (MOIS ?) de conversations qui sont toujours les mêmes, des sempiternels « Quel est ton plat japonais préféré ? », « Est-ce que tu manges du Natto ? », « Tu préfères le Japon ou la France ? »…
Et voilà qu’entre temps, j’avais vécu et fait des rencontres en Australie… Et ok, je n’avais peut-être pas trouvé l’homme de ma vie, mais j’avais retrouvé quelque chose qui m’avait énormément manqué : la spontanéité des échanges.
Bien sûr, même en Occident les premières conversations sont toujours un peu redondantes (« Salut, ça va ? Quoi de neuf ? »… Qu’est-ce qu’on répond de neuf à quelqu’un qui ne sait rien de vous ?!), mais il y a toujours une poignée d’originaux et quand le feeling est là, ça se décante assez vite.
Au Japon… C’est un peu moins fluide selon mon humble ressenti.
Aussi, je me rends compte que je refuse quasiment tous les profils Japonais d’office, sans même leur laisser une chance, car j’ai une flemme intersidérale de repasser par tout ce pataquès et que je suis devenue une expat blasée.
Mais au bout d’un moment, ma conscience bien-pensante ne peut s’empêcher de se remettre en question : « Oui, mais tous les dégager d’office, est-ce que c’est du racisme ? N’est-ce pas de la discrimination que de refuser chaque Japonais sans même essayer… ? T’es revenue vivre au Japon ma cocotte, va bien falloir cohabiter. ».
Repentie, je décide donc de faire table rase sur mes mauvaises expériences passées et de redonner sa chance à l’autochtone.
Et je commence donc à relâcher quelques « like » à des profils un peu moins soporifiques que d’autres, histoire de ne pas passer à côté de l’homme de ma vie juste pour m’éviter les 「日本語上手ですね!」( « Que tu parles bien Japonais ! », qu’on se bouffe à toutes les sauces et qui nous agace tous au bout de quelques années).

Et c’est ainsi que, pleine de bonne volonté, je finis par matcher avec Leopold (oui, un prénom typiquement japonais…).

On entame une discussion et bon… Il n’est pas vraiment passionnant, mais il a un petit chien en photo de profil et mon propre chien me manque. Du coup, on parle passion canine, et – peut-être plus séduite par la boule de poils que par son maître – je finis par sympathiser.
Clairement, Léopold n’a pas le monopole de l’originalité et je me bouffe TOUTES les phrases et questions surfaites que je redoutais.
Mais je prends sur moi, et essaie de retrouver l’enthousiasme et l’innocence de mes premières années au pays du soleil levant.

Léopold habite à bout de brousse, et en bon Japonais, il est très occupé – le syndrôme isogashit qui sévit sur le pays depuis des décennies – donc difficile de trouver un créneau pour se voir, mais on finit par se caler un samedi après-midi.
Il me propose de se voir dès 14h à Roppongi.
Ok, pourquoi pas.
On se retrouve évidemment à l’endroit que je déteste le plus dans cette ville : sous la « Maman », l’araignée géante de Roppongi Hills.

Non vraiment, en tant qu’arachnophobe, cette sculpture est éprouvante et l’attendre là-dessous me met en sueur. Rien qu’uploader cette photo me fout des frissons.
Certains me diront que je ne suis pas très chauvine, puisque c’est l’œuvre d’une artiste française, Louise Bourgeois mais… Sérieux, elle pouvait pas faire des chatons à la place ?

Je retrouve assez rapidement le jeune homme, tout intimidé de vivre son premier date avec une étrangère, et sous un soleil de plombs, on arpente les petites rues de Roppongi pour aller se manger de bons cinnamon rolls au CINNABON.

C’est donc le moment où on essaie de manger dignement sa pâtisserie sans se mettre du glaçage partout, tout en continuant d’échanger des banalités.
Respectant toujours le code des conversations balisées, Leopold me demande ce que j’aime faire quand je sors avec mes amis. Moi-même, je ne suis pas très originale dans mes réponses : izakaya, karaoke, cinéma…
Il bloque sur le karaoke « Oh ! Mais du coup, tu chantes des chansons en Japonais ? Oui ?! Oh, j’aimerais trop entendre une étrangère chanter en Japonais…! Tu veux bien aller au karaoke que je vois ça ?! ».

Arf.
L’expat blasée sur mon épaule gauche s’insurge : « Encore un qui veut que tu fasses le petit singe savant pour le divertir ! », tandis que la candide bien-pensante sur mon épaule droite tempère : « Il ne pense pas à mal ! Et de toute façon, vous aviez rien de prévu de spécial, alors pourquoi pas un karaoké ? C’est toujours sympa.».

Alors soit, vendu pour le karaoke.
Donc très vite, on se retrouve dans notre petit box à deux, télécommande en mains devant le catalogue infini de chansons.
Il se dit timide et refuse de chanter « Non non, toi en premier ! Moi je chanterai après ! ».
Ah ben nous voilà beau. Je suis vraiment là pour faire le spectacle, apparemment.
Docile, je choisis donc une chanson japonaise relativement connue, et commence à chanter.
Il est tout excité et lâche des すごい!(Incroyable !) à tout va, à deux doigts de me filmer pour monter aux copains sa trouvaille : une Française qui chante en nipponois. Wouaouh.
Pendant que je chante, le serveur vient dans notre box pour nous apporter nos boissons, un cocktail fruité pour moi et une bière pour lui, dont il apprécie la fraîcheur tout en m’écoutant avec des étoiles dans les yeux.
Je finis ma première chanson sous son admiration un chouya exagérée, et comme il n’a pas choisi encore sa chanson, il me propose d’en remettre une pendant qu’il cherche ce qu’il veut chanter.
J’espère qu’il ne va pas me faire le coup de ne chanter qu’une fois sur cinq, mais soit. Je remets donc une chanson.

Cependant, l’euphorie de la découverte est passée. C’est bon il sait à quoi ressemble une Française qui chante en Japonais. Ainsi Leopold se désintéresse de mes prouesses de chanteuse venue d’ailleurs pour plonger son nez sur l’écran tactile de la télécommande et se chercher une chanson, toujours en dégustant sa bière.
Moi je termine ma chanson tranquillement, puis repose le micro… et rien ne se passe.
Leopold ne dit rien, la chanson suivante ne se met pas en route… Le néant.

Alors je me tourne vers lui, et ce que je vois ressemble plus ou moins à ça…

 

LE PELO S’EST ENDORMI !!!!!!

Non mais vous y croyez ? Sérieux, abandonné cinq minutes à son triste sort, le mec dort déjà du sommeil du juste affalé sur sa banquette la bave à la bouche !
Putain, j’ai déjà vécu pas mal de trucs tordus, mais celle-là on me l’avait jamais faite !
Décontenancée, je tente quand même un réveil : « Léopold ? Léopold… ! C’est à toi de chanter… ! ».
Mais le mec est rouge vif, il ouvre vaguement un œil, marmonne je ne sais quoi… Et se rendort.

 

Eh merde… Il est cuit.
Je suis tombée sur un de ces Japonais qui ne tient absolument pas l’alcool. Le gars a même pas bu la moitié de sa bière, et il est déjà complètement dans le cirage !
Le voilà donc en mode déchet sur sa banquette…. Pendant que je me retrouve seule avec mon micro. Ça fait même pas une heure qu’on se connaît, ça commence bien.

Qu’est-ce que je fais ?
J’ai essayé de le réveiller mais ça n’a pas été probant. Je pourrais m’en aller mais… Une part de moi culpabilise de laisser ce pauvre bougre complètement bourré avec ses trois vieilles gorgées de bière cuver seul dans un karaoke.
Au final, je décide d’être pragmatique : nos 2-3 heures de karaoke sont commandées, notre formule de boissons à volonté aussi, et ça fait longtemps que je n’ai pas chanté.

Je décide donc d’ignorer la viande saoule endormie à côté de moi et de vivre ma meilleure vie : je chante à tue-tête et commande mes consommations sans compter.

Autant vous dire que Leopold a manqué un spectacle d’anthologie. Lui qui était curieux de voir une étrangère chanter, au fur et à mesure que le temps passait, et que je voyais que son sommeil était imperturbable, je me suis lâchée et j’ai fait un show digne de Beyoncé.
Et vas-y que je tente les chansons aux aigus casse-gueule (Chandelier de Sia pour n’en citer qu’une), les gros sons de metalleux avec une death voice magistralement ratée, les Disney niais avec un « Let it go » que plus personne ne peut pifrer…
Je m’en donne à cœur joie. Je fais les chorée, je monte sur les sièges – true story- et j’occupe au mieux ces heures laissée seule à l’abandon… Heureusement que j’aime chanter.

Pendant tout ce temps, Leopold est au max…

Se passe ainsi plusieurs heures, jusqu’à ce qu’on reçoive le coup de téléphone de la réception à 10 minutes de la fin du temps imparti, pour nous prévenir que notre session est bientôt terminée.
Le téléphone réveille notre jeune dormeur, qui sort lentement de sa léthargie… et n’assume pas du tout :
« Oh pardon, c’était si beau que j’ai fermé les yeux et je me suis assoupi quelques minutes quand tu chantais. »

 

Non mais gros, tu t’es pas ASSOUPI ??! T’as juste tapé ta meilleure sieste en plein rencard pendant que je me retrouvais à flirter avec le micro faute de mieux !
J’ai eu le temps de préparer ma participation à The Voice et Incroyable talent pépouze pendant que tu piquais ton roupillon !
Quelques minutes qu’il me dit en plus, quelle audace !
Le mec a bien de la chance que j’aime pousser la chansonnette et que j’avais envie de rentabiliser mon déplacement, sinon il se serait juste réveillé tout seul.
Sans pitié, je lui précise que toute la séance est terminée et que j’ai passé des heures à chanter seule. Donc non, il n’a pas juste « fermé les yeux quelques minutes », il a fait un coma au nez d’une meuf qu’il connaît à peine.
Leopold s’excuse platement, il est confus. Il ne pensait pas que sa bière (même pas terminée…) lui monterait tant à la tête… Il est fatigué en ce moment, il fait chaud, tout ça.

On passe à la caisse dans un silence pesant, et il insiste pour payer le karaoke alors qu’il n’en a même pas profité cinq minutes.

Je m’apprête à rentrer chez moi, quand Léopold tente de faire amende honorable : « Je suis vraiment désolé… Je t’ai laissée passer l’après-midi toute seule, ça ne se fait pas. J’étais fatigué, je n’ai pas tenu ma bière… J’aimerais vraiment me rattraper. En plus j’appréciais ta compagnie alors… Est-ce que tu accepterais d’aller dîner avec moi ? »

Heu… En toute honnêteté, mon intérêt pour Léopold déjà relativement ténu de base s’est envolé en fumée à la seconde où je l’ai vu ronfler la bouche ouverte. Mais une part de moi a pitié de lui.
C’est pas nouveau que certains Japonais ne tiennent absolument pas l’alcool, et j’imagine qu’il s’en veut de s’être endormi comme ça.
Surtout qu’au final, on a pas tellement échangé durant toute cette journée, à part le bref moment où on a mangé nos roulés à la cannelle.

Léopold me propose de se rattraper et de m’inviter à manger tout ce qui me ferait plaisir.
L’expat blasée veut juste rentrer chez elle buller devant une série, mais la bien-pensante pense qu’il a quand même mérité une seconde chance. En plus, il y met quand même du sien, il a l’air de bonne volonté.
Aussi, bien que peu motivée, j’accepte de poursuivre la journée et d’aller dîner avec lui.
Il me demande ce que j’ai envie de manger, il se trouve que j’ai une terrible envie d’huîtres et de poisson cru, et qu’il connaît l’adresse parfaite pour ça.

On prend donc les transports pour se déplacer jusqu’au quartier de Iidabashi, où il m’emmène dans un restaurant perdu dans les sous-sols d’une petite rue. Clairement un endroit que je n’aurais jamais trouvée seule.

Et j’avoue que le carte est très alléchante. Je retrouve ma joie de vivre et me dis que j’ai bien fait de lui donner sa chance, finalement. (L’estomac est facilement corruptible.)
Il commande plusieurs plats, à base d’huîtres, de carpaccio de thon rouge ou autre… puis parcours le menu des alcools…

 

Guilleret, Leopold me dit innocemment « Je vais prendre une bière, et toi ? ».
Sceptique après cette expérience saugrenue au karaoke, je tempère : « Mm, tu es sûr ? La bière ne t’a pas trop réussi tout à l’heure, donc c’est peut-être plus raisonnable de prendre sans alcool, non ? ».

Mais Leopold s’offusque. Il me soutient que tout à l’heure, c’était la chaleur et la fatigue, à cause de son travail très prenant. Là, il s’est bien reposé – tu m’étonnes ! -, il fait moins chaud, on va manger… Aucun risque que la mésaventure du karaoke ne se reproduise !
Bon.
Léopold est un grand homme trentenaire, il sait se gérer après tout. Et franchement, j’ai pas la foi de materner un gusse que je connais depuis moins de 24 heures.
Je le laisse donc commander sa bière.

Très vite, on nous sert donc notre première séries de plats, ainsi que nos boissons.
Je dois avouer que, si je ne le trouve toujours pas vraiment passionnant, Leopold a trouvé une pépite. Tout est succulent dans ce restau, et je me régale.
Lui aussi, mange et boit de bon cœur.
Je retrouve un minimum de motivation à poursuivre ce rencard foireux. Il me pose des questions sur ma vie en France et comment je suis arrivée au Japon, et je commence à lui raconter quand…

 

Je vois que mon interlocuteur est encore une fois bien rougi par ses deux gorgées de bières et que…. IL LUTTE !
Il lutte pour maintenir ses paupières ouvertes pendant que je lui parle !

 

C’est lui qui dort, mais c’est moi qui fatigue en vérité.
Je tente quand même de le garder avec nous.
« Léopold ? Léopold, ça va ? Tu t’endors… ? »

Réponse décomplexée de Léopold :

 

Le mec s’est… à nouveau rendormi. Y’a du chlorophorme dans ses bières ou quoi…?! Il est narcoleptique ?
Et encore une fois, j’ai beau essayer de le réveiller… Rien à faire.
Pire, cette fois on n’est pas dans un box isolée, mais au milieu d’un restaurant, à la vue de tous les clients et serveurs.
Serveurs qui, continuent de débarquer pour nous servir petit à petit tous les plats que nous avons commandés pour deux.
Ils couvrent donc la table de mets divers… Devant un mec ronflant aux corneilles à table et une étrangère pathétique aux abois.
Malaise TV, le retour.
Je me retrouve seule à table devant une multitude de plats à honorer seule, face à la belle aux bois dormant des bas fonds.
J’ai envie de me casser et de le laisser se réveiller seul comme un con dans son restaurant de merde… Mais mon côté pigeon victime ne peut se résoudre à le laisser comme ça.
Et une part de moi me dit que je l’ai bien cherché. Ce trou de balle m’a déjà dormi au pif tout l’après-midi, et malgré tout, je l’ai laissé m’emmener au restaurant et se recommander une bière… C’est chercher la merde ou je ne m’y connais pas.
Aussi, je reste aussi pragmatique qu’au karaoke, et profite de mon repas – excellent – tout en discutant avec des copines sur messagerie, pour leur raconter ce nouveau misérable échec. J’en profite pour tailler un costard au bougre, rhabillé pour les dix hivers suivants.
Même les serveurs sont gênés de venir à ma table me demander si je souhaite autre chose, c’est dire…

A la fin du repas, je réveille Leopold… qui paraît stupéfié. Même lui semble refuser croire qu’il a réussi à faire le même coup DEUX FOIS dans la même journée.
Il faut dire que c’est une performance tout à fait remarquable.

Toutefois, notre jeune homme ne se laisse pas démonter.
Il agit comme si de rien n’était, me demande si j’ai apprécié le restaurant avec un culot monstre, et vante même la carte qu’il n’a même pas goûté puisque je me suis quasiment tout tapé toute seule.
Je suis fatiguée et le laisse déblatérer dans son coin, jusqu’à ce qu’il prononce les mots improbables : « C’était vraiment sympa aujourd’hui, j’aimerais beaucoup te revoir. »

 

Non mais mec, comment tu peux me dire un truc pareil ?!
Après 7h de rencard passées ensemble, t’as dû passer max 2h éveillé ! J’ai passé la journée à chanter, bouffer et picoler toute seule ! Autant sortir solo à ce stade.
Mon agacement l’emporte, je lui réponds donc sans filtre que je n’ai vraiment aucune envie de le revoir après tout ça.

Léopold « Mais pourtant… Moi j’ai passé un bon moment… ! »
– Comment tu peux dire ça, tu as dormi tout le long !
– Pardon… J’ai du mal à tenir l’alcool…

 

Donc je lui précise que si justement il a du mal à tenir l’alcool, absolument rien ne l’obligeait à en consommer.
Et que OK, au karaoke, la chaleur, la fatigue, il a pu se faire avoir par surprise mais… Pas deux fois dans la même journée, quand même ! Le mec est adulte, il doit savoir se gérer un minimum.
Et là, il me sort le pire plaidoyer du monde : « Mais j’ai fait ça pour t’impressionner !! »

 

Ah bah c’est réussi !

« Je ne voulais pas que tu me prennes pour un gamin si je ne buvais que du jus de fruit, alors j’ai voulu boire de l’alcool pour te montrer que je suis un homme ! »

Heu…
Ecoute Léopold, je ne dirais pas que c’est un échec, je dirais juste que ça n’a pas marché.

Je réponds en toute franchise à Léopold que je l’aurais trouvé moins immature en commandant un lait chaud sucré au miel mais qu’il soit capable d’assurer une conversation, plutôt que s’entêter à commander des boissons qu’il ne tient pas pour me ronfler au pif.
J’ai donc catégoriquement refusé de le revoir car j’avais déjà assez donné de mon temps, et je l’ai laissé prendre le train pour son bout du monde, pendant que je prenais celui dans le sens opposé pour rentrer dans mon home sweet home.

Je n’ai évidemment jamais tenté de le revoir malgré quelques tentatives qu’il a faites par message par la suite, et sauf erreur de ma part, je crois bien que c’est mon dernier rencard avec un Japonais tout court.
Après j’ai juste assumé le fait que j’étais blasée et que je n’avais même plus envie d’essayer… Oups.

Voilà, j’espère que ces petits déboires amoureux vous auront fait rire en cette symbolique date de la Saint Valentin. (J’en profite pour souhaiter un joyeux anniversaire à un de mes humains préférés : Mila❤︎.)
N’hésitez pas à nous faire rire à votre tour en commentaires si vous avez des histoires de dates ratés qui valent le coup, pas de raison qu’on se moque toujours des mêmes, hein !

Je tenais également à vous remercier au passage d’être toujours au rendez-vous. Ces deux dernières années je n’ai quasiment donné aucun signe de vie, même sur les réseaux où je peux parfois m’abstenir de poster pendant des semaines… Et pourtant, vous êtes toujours là.
J’écris un article, et j’ai plein de retours adorables… Ça n’a vraiment aucun prix.
J’essaierai d’être à la hauteur de cette fidélité.
Sur ce, je vous dis à très bientôt pour de nouvelles aventures !

Moment de solitude en prison

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Je vous promettais au dernier confinement la reprise du blog… Comme d’hab, ça a failli !
Mais la vie a voulu que je me concentre sur la recherche d’un emploi, sur ma nouvelle vie avec ce nouvel emploi et… divers événements qui ont fait que.
Mais même avec des mois de retard, chose promise chose due… Je reviens !
Vous le vouliez, vous l’avez : un article !
Un article à l’ancienne, où je vis un de mes plus gros moments de solitude, où je me demande ce que je fais sur cette terre et rêve de m’enterrer vivante au fin fond de l’Arizona si ça peut au moins me sortir de cette situation un peu naze… En gros, un de mes moments de souffrance dont j’ai le secret, et dont vous vous délectez toujours avec avidité.
Bande de psychopathes.

Mais le fait est que cette histoire fait toujours rire mes amis qui me disent qu’elle a sa place sur ce blog alors… Let’s go !

Plantons d’abord le décor de notre belle anecdote, médaille de platine du malaise.
L’histoire prend ses racines il y a déjà cinq ans, en Australie.


Après quelques mois à apprivoiser cet immense pays et son accent un peu déroutant (vous vous souvenez peut-être de l’histoire du boyfriend à la banque… ) à Sydney puis Melbourne, l’heure était venue pour moi d’aller voir ailleurs si j’y étais. J’entends par là réaliser ce que j’avais décidé à la base pour ce voyage : faire le tour du pays valise à la main.
J’ai donc entrepris de partir de Melbourne pour aller à Adelaide, puis Perth, remonter petit à petit toute la côte ouest jusqu’à Darwin, redescendre tout au sud en traversant le centre du pays en passant par Alice Spring, puis remonter jusqu’à Cairns par l’est.
Voilà un aperçu du schéma que j’avais fait en cours de route pour mes proches à l’époque :

Vaste entreprise dont vous aurez certainement d’autres anecdotes dans d’autres articles… Peut-être dans dix ans vu mon rythme d’écriture, mais vu la tronche de ma vie sociale en 2021 on a le droit d’y croire : la crise sanitaire semble être de votre côté et me force à vous récompenser, vous lecteurs fidèles souvent laissés sur le carreau.

Revenons à nos moutons kangourous. Pour pouvoir me loger à moindre prix, j’alternais entre prendre un lit dans les dortoirs de hostels pour backpackers, ou parfois si j’en trouvais à un prix acceptable, une chambre chez l’habitant trouvée sur airbnb, ce qui me permettait au passage de rencontrer des Australiens. Car le fait est qu’en ne passant que d’un hostel à l’autre, on ne rencontre que des voyageurs, pour la plupart étrangers et qu’on se mélange peu aux Aussies… Donc alterner l’un et l’autre me paraissait être un bon compromis pour varier les expériences.
Et c’est ce que j’ai fait arrivée à Perth. J’ai trouvé une chambre très coquette louée à un prix modeste en banlieue proche du centre de Perth, chez Hillary, une Australienne mère célibataire quadragénaire et entrepreneuse.
Elle vivait seule dans une immense maison, travaillait pour sa propre entreprise dans la finance, vivait joyeusement de fitness, de mojito et de voyages à Bali entre copines… jusqu’à tomber enceinte à quarante ans d’un homme qui a eu vite fait de prendre ses cliques et ses claques à l’autre bout du monde en apprenant la nouvelle.
Or, Hilary vivait très mal cette nouvelle vie de mère célibataire isolée, où tenter d’endormir un bébé qui pleure a remplacé ses soirées fiesta entre copines. Elle avait donc pris l’habitude d’accueillir dans son immense maison une à deux personnes de passage.
Une personne qu’elle hébergeait gratuitement en échange de baby-sitting pour son fils de trois ans, et parfois une seconde personne à qui elle louait une chambre pour avoir une rentrée d’argent en plus, mais surtout je crois, de la compagnie.
Elle accueillait généralement des étudiants étrangers en échange universitaire ou des personnes en visa vacances-travail comme moi, car elle adorait écouter les histoires de ses guests à travers le monde.
Quand je suis arrivée dans la maison, elle hébergeait depuis quelques mois Jack, un Allemand de mon âge en vacances-travail qui s’occupait depuis quelques mois du baby-sitting du petit.
Donc pendant que Jack jouait à mettre des cubes de couleurs dans des trous de la même forme et galérait le nez dans des couches nauséabondes, Hilary profitait de mon excellente compagnie devant un plateau d’huîtres et une bouteille de vin blanc devant la télé.
La base.

J’ai beaucoup aimé passer ces quelques semaines chez elle. Je me suis très bien entendu avec Jack et Hilary, je partais vadrouiller la journée dans Perth et ses alentours, j’avais ma propre clés pour rentrer à l’heure que je voulais, j’étais logée dans une chambre tout au fond de la maison donc j’avais ma tranquillité quand je restais pour travailler, et de temps en temps on se retrouvait pour passer une soirée tous ensemble.
Bref, j’étais vraiment très bien tombée.

Hilary offrait deux jours libres à Jack par semaine pour qu’il puisse faire autre chose que courir après un petit monstre enragé et c’est ainsi qu’il m’a gentiment proposé d’utiliser une de ces journées de repos pour me faire visiter un peu les coins sympa.
Bien sûr, j’accepte.
Nous voilà donc partis pour Fremantle (« Freo » pour les intimes), une petite ville figée dans le temps située à une vingtaine de kilomètres de Perth.
Fremantle fait partie des centres culturels les plus importants de la région de Perth.
Elle est notamment célèbre pour son architecture unique, son histoire et ses convict-built qu’on traduira littéralement par des bâtiments « construits par les bagnards ».
Comme vous le savez sûrement, l’Australie a, après avoir été découverte par les Européens, été majoritairement peuplée par des criminels qui encombraient les prisons britanniques. Si on synthétise grossièrement, nos amis Anglais ont envoyé leurs prisonniers en OZ pour faire d’une pierre deux coups : se débarrasser des indésirables et coloniser le pays. Au pire, si le bateau coule avant d’arriver jusqu’à ce bout du monde hostile, on a pas perdu grand chose.
Ah bah on savait déjà être pragmatique à l’époque.
Donc oui, résumé vulgairement, les Australiens non Aborigènes sont pour beaucoup des descendants de taulards. Pas étonnant qu’ils aient pas peur des bêbêtes, les mecs ont du sang de gros durs dans les veines et ils en ont vus d’autres du temps où leurs ancêtres égorgeaient des villageois ou cambriolaient la noblesse londonienne pour trois bijoux.
(J’avais pas dit dans un blog précédent que j’éviterais à présent l’humour sur les pays/communautés ? Rendons-nous à l’évidence, c’est un échec. Mais j’ai quand même tenu presque deux pages words.)
Bref, je m’égare.
Comme les Anglais ont un sens certain du management, nos bagnards parachutés en Australie devaient – en plus de survivre à la faune hostile – construire des édifices pour purger leur peine, notamment le plus célèbre : la prison de Fremantle.
Vous l’aurez compris, les prisonniers ont construit eux-mêmes les murs où on allait les enfermer.
Malin.
De ce fait, cette prison a une histoire très riche et fait partie des endroits « à visiter » quand on passe à Fremantle. D’ailleurs, elle a même emprisonné des célébrités puisque on peut compter parmi ses résidents Bon Scott, l’ancien chanteur d’AC/DC.


Voilà pour vous tout plein d’informations pour briller en soirée. Enfin, dans le monde d’avant, à l’époque où il y avait encore des soirées quoi.
Je vous parle d’un temps que les moins de un an, ne peuvent pas connaître…

Bref, Fremantle est vraiment une petite ville très agréable, culturellement riche, que Jack prend le temps de me faire visiter tout en m’expliquant tout ce qu’il sait, de la prison à la Maison Ronde (le plus vieux bâtiment encore debout de l’Australie Occidentale) en passant par la plage jusqu’au charmant centre ville où regorgent les bars, les magasins et les cafés branchés dans des bâtiments à l’architecture magnifique.

Bref, on passe un excellent moment et on ne rentre que tard le soir après avoir bien profité de notre journée.
Je lui suis reconnaissante d’avoir joué les guides d’un jour, et comme on fait souvent entre backpackers qui ont partagé un voyage éphémère ensemble : on échange nos coordonnées et nos Facebook.

Mon séjour sur Perth s’achève, je passe une dernière soirée avec Hilary et le petit, je reprends mes clics et mes clacs et pars m’enterrer pour plusieurs jours de bus dans le rien de l’ouest australien jusqu’à ma prochaine destination.

Passe ensuite un an, où je continue mon périple Australien, rentre en France la tête pleine des plus beaux souvenirs de ma vie, puis reviens poser mes valises au Japon début 2016.
Puis vers le printemps, je reçois un message de ce bon vieux Jack qui depuis a terminé son visa vacances-travail en Australie et est retourné vivre en Allemagne, et m’annonce qu’il vient voyager au Japon, dont quelques jours à Tokyo avec un de ses amis.
C’est donc en toute bonne foi que je lui propose de lui renvoyer l’ascenseur et de lui faire visiter Tokyo.
Malheureusement, il n’est de passage qu’en semaine et je croule sous le travail, je ne suis donc disponible que le soir.
Mais qu’à cela ne tienne : y’a plein de choses à faire le soir à Tokyo !
Désireuse de faire plaisir, je demande à Jack ce qui lui ferait plaisir de découvrir : soirée plutôt dans le style japonais traditionnel ou japonais crazy ?
Il me dit qu’ils ont déjà prévu tout un lot de restaurants de sushi et de temple à se faire pendant leur périple, et donc qu’il aimerait plutôt voir le côté fou du Japon.
Go pour crazy donc, c’est pas ça qui manque…
Il me précise juste que ça les arrange d’être sur Shibuya, si je peux trouver quelque chose dans le quartier.
Pas de problème, niveau crazy y’a de quoi faire dans le coin.

Ceux qui connaissent bien le Japon se diront que je ne me suis pas trop foulée – hé, j’avais beaucoup de boulot ! – mais je décide d’opter pour une valeur sûre auprès des touristes Occidentaux : le Lock Up.
Le Lock Up est un des multiples restaurants à thème au Japon. Et si les expats et les nippophiles de la première heure connaissent très bien ce genre d’établissement, généralement ça fait toujours mouche auprès des voyageurs néophytes.

En détails, le Lock Up c’est quoi ?
C’est un restaurant-prison. En gros, quand vous arrivez, une petite fliquette hyper mignonne en mini-jupe vient vous passer les menottes et vous traîne dans un dédale infini de cellules sombres.

(Photo ci-dessus tirée du compte twitter officiel du restaurant)

Une fois qu’on arrive à sa propre cellule, on a déjà plus aucune idée d’où on se trouve dans ce foutu restaurant tellement tout est sombre et se ressemble. Evitez donc les alcools diurétiques type bière pendant votre repas, sinon à chaque envie de pisser vous errerez des heures dans ce labyrinthe infernal pour trouver les chiottes, jusqu’à finalement abandonner pour pleurer dans un coin perdu parmi les cellules et qu’on finisse par retrouver votre cadavre sec et esseulé quelques mois plus tard.
Comment ça j’en rajoute ?

La nourriture servie est gustativement très discutable (je dirais que leur plat de pâtes vaut bien la digne note de étudiant fauché/20 au guide michelin du médiocre), mais elle a le mérite d’être sympa : forme de chauve-souris, de squelettes, de pierre tombale etc.

Bref, on vous met dans l’ambiance du lieu et c’est plutôt sympa.
Et une fois par heure : il y a un happening.
Toutes les lumières s’éteignent, une alarme sonne, une grosse voix vous annonce qu’il y a une évasion de monstres détenus dans la prison et qu’ils sont en train de se balader en pleine liberté dans les couloirs.
Les monstres en question : de jeunes Japonais sûrement étudiants en quête d’un job d’appoint pour se payer leur prochain portefeuille Louis Vuitton déguisés d’un sac à patate et d’un vieux masque en plastique premier prix acheté vite fait au Donki (Foir’fouille japonaise) du coin.
(Au Diable mes résolutions de ne plus être médisante… je ne sais pas écrire sans mauvaise foi de toute façon.)

(Photo tirée du compte twitter officiel du restaurant)

Nos jeunes freluquets déguisés pour pas cher viennent donc nous terroriser en entrant nos cellules en poussant des cris horrifiques, secouer les barreaux de nos portes, se rapprocher d’un peu trop près en faisant mine de nous attaquer… Jusqu’à ce que les fliquettes en mini-jupe viennent leur mettre la pâtée sur la musique à fond de Ghost Busters.

C’est rigolo, c’est bon enfant, ça fout un peu la trouille mais pas trop (je suis une immense trouillarde et ce niveau guignolesque me convient tout à fait), c’est très sympa pour une soirée d’anniversaire ou de Halloween, et pour les Occidentaux en vacances qui n’ont pas l’habitude aux restaurants à thème, c’est toujours une agréable surprise et un moment rigolo qui feront une belle anecdote. J’avais zéro chance de me planter sur ce coup.

Je m’apprête donc à téléphoner pour réserver notre table… Mais comme souvent, les Dieux ne sont pas avec moi, et on m’informe que le Lock Up est fermé tout le mois pour rénovation.
Arrg !
Mince, moi qui avais mon plan tout prêt, il faut que je trouve autre chose.

Je cherche donc sur Internet, et là, je vois que beaucoup d’internautes comparent le Lock Up à un autre restaurant à thème du même type : l’Alcatraz E.R.
Ce dernier se trouve également à Shibuya, est exactement dans le même genre (un restaurant prison) et bien souvent, il est commenté pour être « encore mieux que le Lock Up ! ».
Cool ça.
Il me semble en effet en avoir déjà entendu parler, mais je ne l’ai jamais testé.
Je vais donc rapidement voir le site, constate en survolant les photos que c’est également un restaurant prison horrifique. Sans chercher plus loin je réserve, heureuse d’avoir aussi rapidement trouvé un plan B.

Arrive le jour J et je retrouve notre ami Jack ainsi que son compère dont j’ai complètement oublié le prénom, et que nous appelleront donc Gustaf, pour faire Allemand, pour pouvoir l’appeler Gusgus quand le cœur nous en dit et parce que pour faire la paire avec Jack, c’est drôlement bien trouvé.
Ça frise même le génie.

Entre la gare et le restaurant je fais connaissance avec Gusgus et lui demande ce qu’ils ont fait de leur journée. Il me raconte qu’ils ont passé l’après-midi dans un neko café (soit un café où on paye pour consommer sa boisson entouré de chats) mais qu’il a détesté cette expérience.
Comme je suis pas fan des cafés exploitants les animaux, je me demande si c’est pour les raisons que je soupçonne et lui demande pourquoi mais sa réponse est à des années lumières de mes questions éthiques : « Bah on avait l’air de deux gros gays avec nos chocolats chauds au milieu des chats. C’était horrible, je suis hétéro moi, je sais pas pourquoi on a perdu notre après-midi dans ce truc.»

Ah.

Je note donc que Gusgus semble atteint du fameux syndrôme de masculinité fragile où l’orientation sexuelle est très vite menacée par trois chats et un Nesquick.
Fort bien.

Comme je ne trouve déjà plus grand chose à lui dire, j’abandonne donc Gusgus à ses réflexions un poil homophobes pour prendre des nouvelles de Jack depuis tout ce temps.
Je le préviens que j’ai prévu un petit restaurant « crazy » afin de répondre à sa demande et que j’espère que ça lui plaira.
Et c’est ainsi que très enthousiastes, nous arrivons devant le restaurant… qui deviendra le théâtre de mon plus grand moment de solitude.

À vos popcorn.

Nous arrivons dans l’établissement et à peine entrés, je remarque que l’ambiance du restaurant est un cran plus glauque que celle du Lock Up.


Au Lock Up, si tout est sombre et se veut horrifique, on reste dans un délire bon enfant avec un décor digne du train fantôme de la Foire du trône.
Là, je vois des cellules au loin, et les serveuses fliquettes en mini jupes sont remplacées par des serveuses en mini blouse d’infirmière, donc on pourrait penser qu’on reste dans un délire « prison de l’horreur » version hôpital psychiatrique abandonné… mais je sens assez vite qu’il y a quelque chose de différent. Peut-être un peu trop de faux sang et de faux membres humains un peu partout, ou peut-être ces objets en latex et en métal un peu partout qui ne me disent rien qui vaille…
L’homme qui semble être le manager des lieux est moyennement accueillant et nous fait attendre.
Jack et Gustaf sont entre amusement et gêne, ils ne savent pas trop à quoi s’attendre.
Gustaf, clairement pas à l’aise, se fait plus petit et bat en retraite pour s’appuyer contre le mur, mais il semble se prendre quelque chose dans les fesses et se retourne d’un bond.

Ah.

Pour quelqu’un qui avait peur que son hétérosexualité soit remise en doute dans un café à chats, se prendre un god rose bonbon dans l’arrière-train à peine arrivé dans mon restau, ça doit lui faire tout drôle.

Des fois, je trouve qu’il y a quand même dans l’ironie de la vie un alignement des planètes fascinant. Je ris sous cape de ce retour de karma, et pourtant… Un malaise s’installe.
C’est quoi le rapport entre mon restau à thème prison et les sextoys… ?

Après quelques minutes à attendre dans l’entrée, on nous emmène enfin à notre cellule, un peu à l’écart des autres clients.
Comme le veut la coutume dans les restaurants au Japon, la serveuse nous apporte très vite nos oshibori, soit les rouleaux de serviettes chaudes (en hiver, sinon froides en été) pour qu’on puisse se rincer les mains tout en se réchauffant en peu.

Sauf qu’au lieu de me tendre normalement ma serviette, la serveuse se tourne vers moi et me dit en anglais POUR QUE TOUT LE MONDE AUTOUR DE CETTE TABLE PUISSE BIEN COMPRENDRE :

« See ? It looks like a dick. Do you like dicks ? « 

Heu…
Bah c’est à dire que là, à brûle-pourpoint… Je ne sais pas quoi répondre, voyez-vous.
Jack et Gusgus ouvrent des yeux ronds et se tournent vers moi, clairement pas sûrs d’avoir bien entendu.
Je bafouille une réponse inintelligible, le dos déjà trempé de sueur, mais la serveuse ne me laisse pas m’en tirer à si bon compte et continue.

« It looks like a dick, but a soft dick. I prefer hard dicks. What about you ? »

Et je n’ai pas le temps de me réjouir qu’elle ne me laisse pas le temps de répondre, que la jeune dame prend mon visage… ET ME BIFLE AVEC LA SERVIETTE.

Oui, mesdames et messieurs, vous avez bien lu.
Ma première – et dernière – bifle, et elle a eu lieu à mon insu dans un restaurant glauque face à deux semi-inconnus qui commençaient à sérieusement se demander où je les avais emmenés.
Vous avez le ton de la soirée.

Rouge écarlate et pétrifiée de honte, je glousse bêtement pour sauver la face alors que je me liquéfie intérieurement, et je commence à me justifier auprès de nos voisins Allemands qui se demandent clairement le degré de « crazy » du lieu que j’ai choisi.
Je leur précise donc qu’en fait je ne connais pas cet endroit, que je voulais les emmener dans un autre que je connais bien et qui est plutôt rigolo, mais qu’il est en rénovation et que celui-là était réputé pour être du même genre.
Je précise qu’il a l’air un peu plus branché humour graveleux, mais que tout le monde en commentaire disait que c’était un restaurant à thème très sympa, donc que y’a pas de raison.

Jack se marre, mais Gustaf est plus fermé et raide que jamais.
Je commence à me dire que cette soirée risque d’être longue.

Bref… C’est à ce moment-là qu’on découvre le menu.
Et malheureusement, les choses vont de mal en pis.
Si au Lock Up, la bouffe prend la forme de petites têtes de mort, de petits fantômes ou à la limite d’un bonbon en forme d’œil dans votre cocktail… Là, quasiment tout prend toujours une tournure sexuelle.
Cocktails à mélanger avec des gods ou des plugs anaux, bananes dégoulinantes de lait concentré, bœuf à la sauce blanche très suggestif, jusqu’au dessert phare : la gelée de fruits rouges…

Qui une fois terminé, selon une photo vue sur le tripadvisor japonais, ressemble à ça…

Bon appétit.

Alors si on peut quand même accorder au chef son ingéniosité impressionnante pour rendre sa bouffe plus indécente que nature avec un réalisme déconcertant, je sens que je suis en train de perdre l’Allemagne en face de moi.
Jack et Gusgus regardent la carte d’un air effaré – et dégouté, appelons un chat un chat – tout en échangeant des messes basses en allemand.

A cet instant, je me sens comme ça :

Même si ce n’est franchement pas ragoutant et que je suis pas très fan du délire, peut-être que si j’étais venue là avec des amis proches, on aurait pu en rire. Mais le fait est que je suis seule avec deux hommes, un que je ne connais absolument pas et l’autre que j’ai connu quelques jours il y a plus d’un an et avec qui je n’ai quasiment jamais échangé depuis…
Du coup, plutôt que de rire ensemble du côté complètement grotesque de cette soirée et de transformer ce fail en fou rire, un gros malaise s’installe à notre table.

Clairement, la gelée de fruits rouges servie sur la serviette hygiénique leur a coupé l’appétit… Et on ne va pas leur jeter la pierre, qui a envie de payer pour bouffer là-dessus, sérieux ?
(Selon les commentaires sur internet, beaucoup de monde… Notre civilisation n’a-t-elle pas mérité le covid, finalement ?)

Ils retournent donc vers la page des cocktails, cherchant le truc qui les dégoûtent le moins et certainement pas trop phallique pour eux.

Et alors que je regarde les ingrédients de chaque cocktail, dont certains ont l’air pas si mal malgré le visuel, mon regard bloque sur une boisson en particulier.
Celui traduit en anglais par « Contraception Juice ».

 

Dans la liste des ingrédients, il y a marqué « Lychee + Grape + Sperm in condom ».
Donc évidemment, je pense à une blague potache, comme un peu tout le reste de la carte.
Sauf que ce qui m’interpelle, c’est que pour tous les autres cocktails, il y a marqué les vrais ingrédients. Ainsi, c’est souvent précisé que le faux sperme est du lait concentré. Mais là, non.
Intriguée, je lis la description en japonais… et là j’en lâche ma fourchette.
終わった後のアレを再現してしみました!
ホンモノですので、嫌な方は無理せず

Qu’on pourrait traduire rapidement par :

Nous avons essayé de reproduire la chose après avoir terminé notre affaire.
C’est du vrai, donc évitez si ça vous rebute.

Je bugue sur la seconde phrase.
ホンモノですので、嫌な方は無理せず, C’est du vrai, donc à éviter si ça vous rebute…

…Ils parlent… de quoi au juste ?
C’est quoi qui est… « DU VRAI » ???
Ça ne peut quand même pas être du vrai sperme, c’est impossible. Ils parlent forcément du préservatif, c’est une blague graveleuse au message franchement discutable du genre « C’est mieux sans », n’est-ce pas ? Ça ne peut être que ça, de toute façon.
Mais je ne peux pas m’empêcher d’avoir un peu le doute… Parce que pour tout le reste, c’est du vrai aussi.
Les cocktails sont bien mélangés avec de vrais godemichets, ce sont des vrais plugs anaux dans les verres, la bière est bien servie dans de vrais conteneurs d’urine, ce sont de vrais tampons qui flottent dans les boissons rouges en guise de sachet de thé, et c’est bien une vraie serviette hygiénique en guide d’assiette pour le dessert.
Et pourtant, pas une fois il est précisé pour ces accessoires : « c’est du vrai, donc évitez de commander ça vous dégoûte », alors…

Une part de moi pense que c’est une blague à la con vis à vis du préservatif, d’autant que… A quel moment ce serait possible ?
Je veux dire, déjà rien que pour faire les stocks d’ingrédients, ça se passerait comment ?
Y’aurait un vieux crado dans la cuisine, une main dans le falzar et l’autre en train de zapper sur youporn prêt à livrer commande ?
Je veux bien admettre que ce monde est fou, mais quand même… Ce restau est plébiscité par plein de touristes, c’est impossible…

Et d’un autre côté, ce pays est tellement fou. On a bien déjà trouvé des distributeurs de culottes usagées, donc à partir de là…

Non. C’est tout bonnement impossible, mais je ne peux pas m’empêcher de douter, abandonnée seule dans mon coin de table pendant que Jack et Gustaf n’arrivent pas à se décider car rien ne leur inspire confiance.
Du coup, je décide de garder mon doute pour moi.

Jusqu’à ce que je les vois s’attarder sur ce cocktail, cherchant à savoir ce qu’il est écrit. Car depuis le début, ils me demandent régulièrement de traduire le menu.
Raaaah !

Je me dis que ça ne peut être qu’une sale blague, mais transparente, je leur traduis tout de même ce qui est écrit en japonais.
Et là, j’ai beau insister sur le « mais c’est sûrement des conneries, ils doivent parler du préservatif… », je sens mes deux acolytes devenir tout blancs. Gusgus marmonne à nouveau en allemand, demandant certainement à Jack s’il est sûr de bien me connaître, et si je ne vais pas les emmener ensuite dans une ruelle sombre pour les dépecer et vendre leurs reins au marché noir. Voire leur semence, pour alimenter les cocktails de ce restau de malheur.

Et alors que j’essaie de les convaincre que c’est forcément une blague au goût douteux, que ce restaurant reste assez populaire et connu donc impossible qu’il serve ce genre de choses… Les gérants de l’établissement semblent décidés à me décrédibiliser.

En effet, ils choisissent pile l’instant où je tente de les rassurer, pour faire sortir un groupe de clients Japonais de leur cellule, pour leur faire boire des shot de tequila… suivi de grosses baffes dans la gueule.

 

J’ai trouvé des vidéos, pour vous donner une idée :

Autant vous dire que mon laïus pour dire « mais non hihi, c’est un restaurant un peu potache, voilà tout » avait autant de crédibilité que Buzyn quand elle nous a sorti que le coronavirus ne viendrait jamais chez nous car elle avait mis des affichettes dans les aéroports. Je sors les rames, pagaie à contre-courant de toutes mes forces.
Je sens Gusgus plus tendu qu’un string trop petit après les fêtes de Noël, regardant les autres clients se faire tarter la gueule de bon cœur d’un air ahuri.

Le malaise est tellement palpable à notre table, qu’un silence de mort s’est abattu sur la France et l’Allemagne, plus du tout dans le délire.
Les minutes deviennent heures, j’ère dans un tunnel infini de gênance, et je ne vois pas -ne serait-ce qu’un reflet- de la lumière de la délivrance.

Finalement, nos compères sont dégoûtés de la carte – en vrai, moi aussi du coup– et optent pour un cocktail le plus soft possible et le riz cantonnais en forme de nibards.

Petits joueurs nous sommes.
Comme je suis stupide, je choisis le cocktail dans un biberon, car il m’évite au moins de le boire avec un plug anal.
…Et bien évidemment, ma copine l’infirmière bifleuse vient en remettre une couche en me prenant le visage dans ses mains pour me donner le biberon.
Sauf que mes invités ne pensent qu’à se barrer de cet endroit, et chaque intervention de ce genre les tend davantage et me donne un peu plus envie de m’enterrer vivante.

Et alors qu’on mange et déguste un repas garanti sans sperme, toutes les lumières s’éteignent pour le happening du restaurant.
Putain, j’avais oublié ces conneries.
Si au Lock Up l’ambiance est plutôt drôle et fait sursauter vite fait – et encore, parce que je suis trouillarde, sinon c’est juste rigolo -, là tout est plongé dans le noir total, il y a des bruits de pas, des râles, la voix d’un enfant qui nous souffle qu’on va crever… Ambiance film d’horreur bien au delà de ce que je suis capable de supporter.
Et seule à mon bout de table, terrorisée dans le noir, j’attends recroquevillée et les larmes aux yeux que ça s’arrête, pendant que Gusgus et Jack se serrent les couilles entre coudes (ou l’inverse).

Jack semble essayer de profiter quand même de la soirée, mais Gusgus est clairement au bout de sa vie, comme s’il allait se faire attaquer par un nouveau god ceinture à tout moment. Evénement qui semble sans fin… Jamais la musique entraînante de Ghost Busters ne m’a tant manqué.
A peine l’événement fini, on finit à peine notre riz en forme de boobs moisis, et on s’en va sans demander notre reste.

A peine sorti du restaurant, nos deux amis veulent décompresser et aller en boîte de nuit.
Moi je suis rincée, pas du tout à l’aise, et surtout je travaille le lendemain, alors après m’être excusée pour le mauvais choix de restau, je les lâche dans le coin des discothèques et les abandonne…
D’ailleurs, je soupçonne très sérieusement Gusgus d’avoir été soulagé que je ne leur propose pas une boîte de mon cru…

Etrangement – non -, je n’ai jamais revu Jack ensuite et on n’a plus jamais échangé… Je pense sincèrement les avoir traumatisés.

Au final, je n’ai jamais su s’il y avait vraiment du sperme dans ce foutu cocktail.
Je pense que non (impossible autrement, point de vue sanitaire, tout ça tout ça), et que c’était forcément une mauvaise blague au lait concentré, mais en cherchant quand même une réponse à cette question, j’ai vu que je n’étais pas la seule à avoir bloqué la dessus et à avoir la trouille :

« Mais pour le cocktail Contraception Juice, qu’est-ce que ça veut dire le « c’est du vrai » au juste… ? (terreur) « 

Au final, même si c’était pas mon type de délire, je pense que y’avait moyen d’en rire et de passer une bonne soirée malgré tout si j’avais été avec des amis proches… D’ailleurs, en règle générale, tous les groupes d’amis qui sont allés là-bas se sont marrés. Comme quoi, on peut vraiment rire de tout, mais ça dépend avec qui…
Là, ça a quand même été un epic fail, et eux qui voulaient du crazy, je pense qu’ils ont été tellement choqués que 4 ans après, ça doit encore alimenter – tout comme moi – leur discussions en soirée.

Etrangement, alors que l’Alcatraz semblait hyper populaire auprès du public, il a fermé définitivement six mois plus tard, alors qu’il faisait toujours salle comble.
Mon imagination a alors aussitôt visualisé une inspection d’hygiène trouvant monsieur crado la main toujours dans le calbut pour délivrer son Contraception Juice.

Pouah…

Bref, c’était l’histoire de deux visites de prison.
Une culturelle à Fremantle, agréable et intéressante.
Et la mienne, de loin mon plus gros échec de guide touristique…

Hommage au Hérisson

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Mon cher frère,

Aujourd’hui, c’est ton anniversaire.
Et pourtant, je t’ai enterré hier.

Sacré tour de cochon que tu nous as fait là.

On m’a souvent dit que je parlais rarement de toi. C’est vrai et c’est faux.
Tu étais un sacré personnage, que tout le monde ne comprenait pas forcément, alors tu faisais partie de mon jardin secret à moi.
Mais à mes amis proches, je parlais très souvent de toi. A quel point je m’inquiétais perpétuellement pour toi, les conneries qu’on s’échangeait, ton amour indéfectible – et incompréhensible pour les nouvelles générations, ha ha – pour Johnny Hallyday depuis tes plus jeunes années…
Au point que le jour de sa mort, j’ai quand même des amis d’enfance qui ne t’avaient pas vu depuis 15 ans qui m’ont téléphoné pour savoir comment tu allais.

Au printemps, quand j’ai eu mon entretien dans la maison d’édition où je travaille maintenant, j’attendais dans le vestibule de l’entrée qu’on vienne me chercher, face à une grande bibliothèque où sont alignés de nombreux titres de la maison.
Et là, j’ai vu ce gros livre sur la vie de Johnny. À ce moment-là, je me suis promis que si j’étais embauchée ici, tu aurais tous les livres de Johnny que tu voulais.
Et dès ma première semaine dans les bureaux, je suis allée mettre ma fierté de côté pour aller au stock demander aux collègues « Dites, j’ai le droit de prendre les livres sur Johnny ? »… Et là, quand on m’a regardée avec étonnement (j’imagine que c’est pas tous les jeunes employés qui réclament Johnny en premier…), je me suis empressée de me justifier « Non mais c’est pas pour moi, c’est pour mon frère !! » parce que bien entendu, je n’assumais pas du tout cette demande.
Mais ta joie quand tu les as reçus valait bien de risquer une étiquette de beauf auprès de mes nouveaux collègues.
Même si après, tu as tellement montré tes beaux livres partout, qu’on a commencé à me réclamer des livres de Johnny en veux-tu en voilà, et que je me disais que j’allais passer pour une grosse fana hystérique, ou qu’on allait me soupçonner d’ouvrir un business de livres de contrebande.

Si je suis toujours restée hermétique à Johnny –quoique… en vrai à cause de toi je connais quasiment toutes ses chansons par cœur -, c’est toi qui as largement influencé tous mes goûts d’aujourd’hui.
Renaud, Guns n’ Roses, Aerosmith, Red Hot Chilli Peppers, Coluche… Tu as éveillé mon goût au rock et aux textes engagés, contestataires et bien écrits. Sans toi j’en serais peut-être restée aux Worlds Apart et Hélène et les garçons.

Pendant mes premières années, tu m’as quasiment élevée. Pour le meilleur et parfois aussi pour le pire : regarder des films d’horreur quand tu me gardais et me traumatiser à vie avec Freddy, écouter en boucle Elmer Food Beat sans t’imaginer qu’après, moi je chantais « Dans la bouche de Danielaaaa » à tue-tête dans la cour de l’école primaire sans avoir aucune idée du sens…

Mais tu t’es toujours occupé de moi, et ce jusqu’à maintenant. A m’acheter des goodies Winnie l’Ourson ou des Princesses Disney même bien adulte, parce que tu savais que ça me ferait plaisir. Ou à m’offrir tout ce que tu pouvais pour soulager ma douleur quand je pouvais à peine marcher, me donnant tout ce qui t’appartenait : ceintures de maintien, béquilles et autres… Alors que tu en avais toi-même bien besoin.

Mon frère, tu es parti et c’est insupportable. Je n’arrive plus à dormir la nuit. Alors je me relève, je lis nos sms, je regarde nos photos et j’écris.
J’avais encore tellement de choses à faire avec toi. D’autant que chaque année, on se faisait un spectacle de stand up tous les deux, une des rares sorties que tu m’autorisais ensemble, parce que c’était pas évident de te convaincre de sortir de ta tanière.
Et deux ans de suite, je t’ai fait faux bond et offert ma place, car les deux fois, j’étais à l’hôpital.
Ça a permis d’offrir à d’autres ce dernier précieux souvenir avec toi, mais moi, maintenant que je sais que y’en aura plus d’autres, avoir raté ça me bouffe.

Les derniers mots que j’aurai échangés avec toi, c’est des memes postés sur Twitter sur Koh Lanta. J’étais rentrée de la danse plus tôt exprès pour voir l’émission en direct, pour ne pas louper ce moment avec toi où on commente en live. Et ces conneries, ce sera finalement notre dernier échange. D’un côté c’est tellement nous, que ça me fait rire.
D’un autre, j’aurais aimé te dire une dernière fois à quel point je t’aime. Je te l’ai dit quelques fois, mais est-ce que je te l’ai dit assez ?
Est-ce que tu le savais vraiment ?

Parce que je t’assure que je t’aimais tellement que tu m’as même valu quelques séances de psy. Je culpabilisais de partir vivre à l’autre bout du monde, de faire ma vie loin et de pas être suffisamment là pour toi.

J’ai envie de raconter mille et unes choses sur toi et moi, et d’un autre côté, j’ai envie de tout garder jalousement pour moi.
Alors peut-être que je vais juste m’arrêter là.
Je voulais juste te rendre une dernière fois hommage, en ce drôle de jour anniversaire.

Hier, j’ai eu l’honneur d’écrire et de lire un texte pour toi lors de ta cérémonie. Avec le soutien de notre sœur et cousines, car comme j’étais trop petite, je n’ai pas de souvenir de toi avant tes 19-20 ans. J’ai l’impression d’avoir raté un grand pan de ta vie et tes meilleurs souvenirs. J’envie ceux qui ont pu partager toutes ces choses avec toi.

Tout le monde m’a dit que ce texte te rendait justice et décrit bien qui tu étais. Alors pour ceux qui n’ont pas pu venir, pour ceux qui ne te connaissaient pas assez…

 

À toi, Samuel.

Sam, Samy, Samos, Manou, Nounou, Nounouss, Le Tam, ‘Ragnar Hanche de Bois, Œil de Faucon et Voleur de Ferrero’ ou encore Moumou, le dernier en date, inventé par erreur par ta nièce Alicia…
C’est vrai que tu étais l’homme aux cent surnoms.
Toi qui n’aimais pas être le centre de l’attention, aujourd’hui on est tous là pour parler de toi et te rendre hommage. Tu aurais détesté ce moment, tu aurais râlé en disant que c’est des conneries tout ça, parce qu’être au cœur de l’attention te mettait dans l’embarras et que tu y répondais en bougonnant. Alors on va essayer de faire ça bien, un texte qui te fait honneur à ta juste valeur, qui te ressemble, que tu aurais apprécié malgré tout.
On pourrait revenir sur ton parcours de vie, mais ce n’est pas ce qui nous semble juste. Car ce n’est ni tes études, ni ta vie en tant que mécanicien ou plaquiste qui révèle réellement le fils, le frère, le cousin, le neveu, l’oncle, le parrain, l’ami, l’homme en or que tu étais.
Parce que pour te connaître vraiment et découvrir la perle, il fallait aller bien au delà des apparences.
Car oui, tu ne laissais pas tout le monde percer la carapace pour découvrir le trésor dissimulé jalousement à l’intérieur, petit cachottier.
Et c’est ce qui rend tout ça encore plus précieux quand on a eu la chance infinie de pouvoir t’apprivoiser un peu.

C’est le 13 octobre 1971 que tu es né, aîné de deux sœurs, Carole et moi, Sonia.
Adorable petit ange aux boucles blondes et au petit nez retroussé, on t’aurait donné le bon Dieu sans confession. Et pourtant, derrière le sourire à croquer, se cachait déjà un petit diablotin qui rendait chèvre sa maîtresse à l’école, qui coupait les têtes de fleurs de son grand-père sans prendre la tige et qui remplissait ses poches de cailloux.
Ça résume assez bien le farceur espiègle que tu es resté toute ta vie, avec tes coups de jet d’eau au visage surprise au moment d’arroser le jardin, tes serpents en plastique plus vrais que nature ou encore le squelette animé dans ton entrée qui en a fait sursauter plus d’un, pour ton plus grand plaisir.

Un farceur au langage fleuri, et ce dès ton plus jeune âge aussi. Mais qui te connaissait bien savait que c’était tes mots d’amour à toi.

Pendant tes jeunes années, tu as été le plus aimant et attentionné des fils. Toujours prêt à aider ta maman pour entretenir la maison, apporter des petits déjeuners au lit, cuisiner des petits plats et assumer avec fierté ton rôle de grand frère. Que ce soit te montrer protecteur avec ta sœur Carole, la couvrir quand elle racontait des salades pour ne pas aller en cours, la défendre contre les caïds du collège parce que t’étais un grand de 3ème et elle une petite 6ème, l’emmener à tes soirées entre potes pour qu’elle s’amuse tout en gardant un œil sur elle…
Ou te conduire comme un père avec moi, ta plus petite soeur, t’occuper de moi quand maman était au travail, me changer mes couches, préparer mes biberons, m’endormir contre toi… Et plus tard, quitter le travail en pleine journée car il y avait un insecte dans ma chambre et que j’étais en panique, jouer avec moi malgré la différence d’âge, jusqu’à passé mon adolescence avec les dimanches à deux devant la Playstation à s’affronter sur des jeux de bagarre ou des courses de voitures.

Pour faire rire la galerie, tu étais souvent le premier, avec ton humour piquant et ta langue affûtée. Tes cousins et tes amis se souviennent certainement avec nostalgie de tous ces moments magiques passés avec toi, que ce soit les parties de fléchettes dans le garage, les jeux de pétanque dans la cour, les baignades à la Sablière, les jeux de rôle au fort de la Dame Blanche, les vendanges chaque année et tous les souvenirs chers à ton cœur que tu y as créés, les bains de boue pour débarquer tout noirs sur la plage et vous décrotter au milieu des autres baigneurs innocents, les parties de pêche sur le radeau, ou encore ton amie la couleuvre cachée dans la frisette de Aulx-lès-Cromary qui faisait fuir tout le monde à grandes enjambées quand elle venait faire coucou, alors que toi tu l’avais affectueusement baptisée Lucette.
Car non, toi les serpents, tu n’en avais pas peur. Tu les aimais et les attrapais sans mal par la queue pendant que d’autres se carapataient si vite que, je cite, « Usain Bolt pouvait aller se rhabiller ».

Tu étais comme ça, tu aimais ce qui défrisait le commun des gens. Les serpents, les requins, les squelettes, les films d’horreur… Et devant nos visages horrifiés, tu répondais par des éclats de rire en nous traitant de petites natures.

Drôle et attachant, tu avais le don pour te faire aimer et t’entourer de gens.
D’abord avec ton groupe d’amis à Charnay, puis tu es devenu par la suite un Portugais de cœur, grand fidèle de l’association portugaise et du Porto Bar où tu t’étais créé une seconde famille.
Il y a peu, tu disais encore que le Portugal était ton plus beau voyage et que tu rêvais d’y retourner.

Toujours dévoué, serviable, beau garçon… Tu étais aussi toujours entouré de filles et a volé plus d’un coeur.
Oui, tout le monde t’aimait.
Pourtant, la vie n’a pas été tendre avec toi. Et les coups impitoyables que tu as pris ont causé des blessures qui n’ont jamais cicatrisé.

C’est ainsi qu’avec le temps, tu t’es fermé.
Le monde a changé, ton entourage a avancé sur son propre chemin, et toi, peut-être parce que tu n’y trouvais plus ta place, tu as tiré ta révérence à la société et préféré t’isoler.

Il est devenu difficile de t’embrasser, de t’approcher ou de partager des sorties avec toi. Tu as compris qu’aimer, c’est baisser sa garde et que ça peut faire très mal, surtout quand on est un grand sensible. Car ce monde n’est pas tendre avec les personnes sensibles.
Alors tu as décidé d’enrober ton cœur d’épines pour ne pas qu’on le piétine.
Mais en s’armant de courage et en se risquant à y piquer son doigt, on pouvait voir que ce cœur en or était bel et bien toujours là, plein d’amour… Même si jamais tu n’aurais voulu l’admettre.

Bourru à l’extérieur, tout doux à l’intérieur.
Plus de bisous et plus de câlin, mais mille et unes attentions et toujours cette même dévotion. Bricoler avec minutie des objets pour faciliter le quotidien, rempoter soigneusement des pousses de plantes pour les offrir, cultiver des tomates, courgettes, ou haricots, garder ton pain sec pour les poules des autres… Tout ça, tu le faisais toujours pour un membre ou un autre de ta famille, ou même un voisin.
Si ta mère te disait qu’elle avait besoin d’une ou deux bouteilles en plastique pour accomplir ses tâches de jardinage, tu étais capable de ne plus jamais jeter une bouteille et les collectionner jusqu’à la nuit des temps pour être sûr qu’elle n’en manque jamais.
Si une sœur te réclamait une tarte aux pommes, tu pouvais revenir dans l’heure avec le gâteau, si la seconde rêvait d’un hamac où lire tranquille dans le jardin, tu pouvais aller en acheter un aussitôt, et attendre chaque année les beaux jours pour lui installer et qu’elle en profite le plus possible. Tu achetais des jeux d’extérieur à ton filleul Alexandre sans raison, juste parce que tu avais pensé à lui en le voyant.
Tu voulais jouer au loup solitaire, alors que bien souvent, tout ce que tu faisais, tu le faisais en pensant aux autres.

Non, c’est vrai tu ne respectais pas les codes, et les conventions sociales te gonflaient prodigieusement. Aussi, Noël, Pâques ou les anniversaires, c’était pas ta tasse de thé, car trop convenu et attendu. Tu n’aimais pas ces obligations où on se montre qu’on s’aime juste parce que la tradition te le demande. Toi, tu étais adepte des attentions gratuites, spontanées, celles qu’on n’attend pas et que tu pouvais faire n’importe quel jour de l’année, seulement parce que tu avais pensé à la personne et envie de lui faire plaisir sur le moment.

Ton petit plaisir à toi et que tu aimais encore partager avec nous, c’était les saisons de courses de F1 chaque dimanche et les épisodes de Koh Lanta, véritable tradition familiale avec nos échanges de sms en direct pour tout commenter ensemble du début jusqu’à la fin.

Tu aimais râler contre la chienne de ta maman parce qu’elle te cassait les oreilles et celles de tout le quartier. Et pourtant, quand tu étais de garde, tu la promenais fièrement dans ta rue, toi grand costaud barbu aux cheveux long avec ton petit chihuahua hystérique au bout de la laisse. Tu étais même prêt à dormir avec elle sur ton canapé dans une position inconfortable sans bouger, juste pour ne pas la réveiller.
Parce que dans le fond, tu n’étais qu’amour, et si les Hommes n’en sont pas toujours dignes, tu le donnais sans compter aux animaux.
Même aux chats.

Tu avais beau dire que tu ne les aimais pas, ce n’est pas la peine de mentir, on a vu les photos de matous prises secrètement dans ton téléphone portable, coquin.
Mais comment avouer que tu les aimais bien quand les maudits félins osaient prendre en chasse les oiseaux à qui tu confectionnais des abris et que tu nourrissais chaque hiver et chaque canicule.
Oui, en bon justicier, tu te devais de leur faire la guerre pour protéger moineaux, pie et tourterelles, armé de ton fidèle pistolet à eau – parce que quand même, il ne faudrait pas leur faire mal pour de vrai non plus.

Tu aimais la nature, les arbres, les fleurs.
Chats, chiens, oiseaux, écureuils… Tu observais et protégeais tout ce petit monde qui venait squatter ton jardin, avec une petite préférence – que dis-je – une PASSION pour les hérissons.
Ah, tes hérissons. Entre la première fois où tu en as reçu la visite, le jour où tu as découvert qu’il revenait tous les soirs, que finalement il y en avait deux, que tu pouvais leur donner à manger pour les aider à survivre aux sécheresses, qu’ils venaient taper à ton volet pour avoir leurs croquettes, qu’ils ne venaient plus car ils avaient peut-être trouvé à manger ailleurs – les ingrats ! –, qu’ils sont enfin revenus mais qu’ils sont devenus trois…!
Tes foutus hérissons, au fil des années, tu nous en as fait une vraie série Netflix à coup de rebondissements, suspense, photos et vidéos, que toute la famille suivait avec assiduité.
Au point que ta mère a fini elle aussi par nourrir et devenir gaga des hérissons de son propre jardin, ainsi que tes cousines… jusqu’à avoir votre propre conversation de groupe spéciale hérisson sur messenger.
Et aujourd’hui, ce petit animal ne sera plus jamais pareil à nos yeux, parce qu’on a tous réalisé l’évidence : le hérisson du jardin de nos cœurs, c’était toi.
Une carapace piquante pour se protéger, mais adorable et impossible de ne pas s’y attacher quand on ignore les épines pour prendre la peine de l’approcher.

Doué pour bricoler, amoureux du travail de la terre, attaché aux choses simples, pas une once de malveillance, de cupidité ou de superficialité chez toi. Tu accordais une importance sans pareille à des valeurs aujourd’hui oubliées, comme le soin des animaux et des plantes. Et quand tu aimais, c’était avec fidélité à la vie à la mort, comme ton Johnny et ta casquette dont tu ne te séparais jamais.
Au final, plus on y pense, plus ça ne fait aucun doute que le monde tournerait plus rond s’il était peuplé de gens avec une âme aussi pure que la tienne.
Ours mal léché ou non, pour ceux qui te connaissaient bien, partager un silence avec toi était bien plus précieux que n’importe quelle conversation.
Tu méritais tellement plus que ce que tu as eu. Tu méritais tellement d’être plus heureux que tu ne l’as été.

Eternel nostalgique, tu ne te reconnaissais plus dans le monde d’aujourd’hui. La génération selfie et réseaux sociaux te dépassait, et tu préférais rester fidèle à un mode de vie et des idoles démodées.
Alors si ton absence laisse un trou béant et insupportable dans nos vies, on essaie de se consoler en se disant qu’aujourd’hui, ton corps et ton cœur ont enfin fini de souffrir et tu es finalement libre et allégé de ta croix. Tu es parti rejoindre ceux que tu as perdus et qui te manquaient tant.
On espère que tu t’éclates à allumer le feu avec Johnny, partager une clope avec Gainsbourg, échanger tes meilleures vannes avec Coluche ou encore te refaire les meilleurs titres de Nirvana avec Kurt Cobain ou ceux des Doors avec Jim Morrison.

T’en aller beaucoup trop tôt a été ta dernière farce. Mais comme toi, on n’oubliera jamais ces moments passés ensemble, gravés à jamais dans nos mémoires.

On t’aime et on t’aimera toujours.
Repose en paix petit hérisson, dernier sobriquet à ajouter à ta liste de surnoms.

Table rase

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Toc toc… ? Y’a quelqu’un… ?

C’est que c’est poussiéreux dans le coin, c’est à peine respirable ! Qui était de corvée de ménage ? Parce que manifestement, la personne a séché pour aller se la couler douce à la plage ! On peut vraiment compter sur personne.
Attendez, j’ouvre les fenêtres pour aérer un peu. Je vais changer la bannière aussi, celle-là pue 2010. Et cette version mobile, oh la la, c’est pas possible…
Bon, ben changeons toute la déco pendant qu’on y est.

…Ah, voilà qui est mieux.
Un an et demi que je n’étais pas revenue sur ces pages. Je vous ai laissés sur l’article certainement le plus dur que j’ai jamais écrit, et je n’ai plus donné de nouvelles, en bonne ingrate.
Bon, ceux qui me suivent sur Twitter ou Instagram ont eu un aperçu de ce que je devenais, mais c’est vrai que j’ai laissé beaucoup d’entre vous sur le carreau après ça.

J’ai tellement à dire, par où commencer ?

Je peux vous donner quelques nouvelles déjà, pour la partie des lecteurs qui a fini en bons chiots abandonnés sur l’autoroute et pour les indécrottables curieux.
Malgré les circonstances actuelles qui m’ont valu quelques crises d’angoisses au début, personnellement je vais plutôt bien. Je sors d’une longue, très longue traversée du désert qui fait que le confinement n’entrave pas trop ma joie d’en être enfin sortie.

Cette fois pas de relation toxique ou d’amoureux douteux pour venir me pourrir la vie, je suis bien entourée et personne ne m’emmerde. J’ai drôlement progressé là-dessus – sortez les cotillons et célébrez ma personne, s’il vous plaît.
Mais je suis revenue du Japon aussi brisée physiquement, bien plus que je ne le pensais, et ça m’a pris longtemps pour me remettre d’aplomb. Une fois arrivée ici, tout a commencé à lâcher sur tous les bords, et j’ai dû mettre toutes mes envies et projets entre parenthèses pour m’occuper principalement de mon corps et de ma santé.
Je peux vous dire que la sécurité sociale a largement regretté mon retour en France, je pense que je leur ai coûté plus de fric en un an et demi, qu’en toute une vie. Clairement, si tous les clients étaient comme moi, je pense que ma mutuelle aurait fait faillite depuis longtemps.

J’étais persuadée que ma reconstruction prendrait une petite année et que tout repartirait du feu de Dieu en 2019, mais les dégâts étaient tels que ça aura mis deux ans et demi…
Je ne vais pas revenir en détail sur mes problèmes de santé parce que les personnes qui me suivent sur Twitter en ont déjà soupé – et est-ce vraiment intéressant, au fond ? – mais ça fait un an et demi que je suis rentrée en France, dont un an que j’habite seule et… Je n’ai quasiment rien fait. Ne pouvant quasiment plus marcher, j’ai déserté les pistes de danse, mon dernier bootcamp de danse latine date de novembre 2018 et je souffrais tellement que sur 3 jours de cours j’ai réussi à en suivre tant bien que mal… deux. Autant vous dire que j’étais ravie d’avoir payé 300 balles de pass et d’hôtel pour ça. Après ça j’ai arrêté d’insister et je n’ai plus fait un seul cours en attendant une guérison qui ne venait pas.
Je ne voyage plus non plus. Du moins, pas comme j’aurais voulu. Je suis quand même partie en Thailande en décembre 2018 car j’avais réservé avant que ma santé ne me lâche… Mais je n’ai pas pu en profiter pleinement (même aller me faire masser était une souffrance, c’est vous dire) et je suis rentrée dans un état déplorable d’avoir forcé sur la corde.
Ensuite j’ai quand même fait la folie d’aller à New York en mai 2019 (j’avais acheté mes billets en janvier, croyant naïvement que je serais guérie d’ici là… on n’apprend pas de ses erreurs) en ne prévoyant qu’un voyage pépère pour réaliser un rêve de ma to do list : faire un marathon de comédies musicales à Broadway. Je me disais que même dans mon état, faire un voyage pour juste poser mon cul dans des théâtres serait à ma portée… Et même ça, ça s’est avéré compliqué et pas vraiment validé par mon médecin. Au final, j’y suis allée sous un traitement de cortisone pour cheval et des doses déraisonnables d’opiacés pour tenir le coup. Merci au passage à l’adorable Mila qui m’a suivie dans cette folie d’orgie de comédies musicales et qui a réussi à supporter mes humeurs souvent irritables à cause de la douleur qui me tapait sur le système malgré tous les antalgiques.
Ma dernière folie en date a été d’aller voir Miyavi en concert à Paris, Bordeaux et Lyon en octobre… Même si j’étais amputée des 4 membres, Miyavi c’est Miyavi et ça ne se loupe sous aucun prétexte. Alors j’ai pris mes places. Et encore une fois ça a été au prix d’une souffrance abominable, et de mélange de différents opiacés pas franchement recommandé. Pour Paris, je n’ai quasiment rien vu, assise au fond de la salle, et Bordeaux, j’ai quand même loupé mon train aller et mon train retour car je ne pouvais pas marcher, et j’ai failli finir aux urgences le lendemain matin du concert car je n’arrivais pas à me lever du lit de l’hôtel…
Bon, je n’ai rien regretté de ces quelques sorties, mais au fur et à mesure, j’ai commencé à me dire que c’était quand même cher payé pour seulement quelques heures de fun.
Une journée à Disneyland m’a couté ensuite trois semaines immobilisée à la maison où je n’arrivais même plus à aller aux toilettes tant je souffrais, par exemple.
Alors finalement, j’ai arrêté de sortir car j’étais psychologiquement fatiguée et que je n’arrivais plus à me dire qu’un jour ça irait mieux. Je n’ai vu que les personnes qui venaient chez moi ou proposaient une sortie tranquille dans un café ou restau pas trop loin, ce qui m’a énormément isolée. J’ai arrêté la photo car je n’arrivais plus à porter mon appareil, j’ai arrêté la danse car je ne pouvais plus marcher, je ne suis allée que peu au cinéma car j’avais du mal à tenir assise, j’ai refusé toutes les sorties qui incluaient un minimum de marche car c’était trop de douleurs ensuite… Bref, je sors de deux ans de lose intersidérale.
Donc je n’ai finalement pas vraiment profité de la France depuis que je suis rentrée, par contre, j’ai bien fréquenté les médecins, les kiné et praticiens de médecines parallèles, ainsi qu’hôpitaux et blocs opératoires. Ça, je connais par coeur.
Et j’en arriverai à cette conclusion : la sécurité sociale est un système béni des Dieux.
Je sais que nos acquis sociaux se font de plus en plus grignoter chaque année, mais je vous assure que j’ai été soulagée que toutes ces merdes m’arrivent une fois ici et pas au Japon, car la prise en charge n’aurait pas été la même.
D’ailleurs, ça a été mon principal argument pour rester en France. À la base, je comptais partir m’offrir une seconde vie en allant me dorer la pilule sous le soleil d’Espagne, mais quand mon corps à commencé à se démanteler comme celui de M. Patate, je me suis dit qu’après avoir tant galéré pour retrouver une carte de sécu, il valait mieux la rentabiliser et que je reste en France.

D’ailleurs, pour un coup, j’ai eu de la chance. Je me suis finalement faite opérer du dos le 2 mars 2020, sortie de l’hôpital le 7, juste avant le confinement et que tout parte en sucette. A 10 jours près, ils annulaient mon opération et je restais dans cet état (avec une risque de paralysie qui me pendait au dessus du pif, ça aurait été sympa).
J’ai ensuite passé un LONG mois allongée dans mon lit, sans avoir le droit de me baisser, ni de m’asseoir, ni de me DOUCHER.
Pratique, me direz-vous.

(Merci maman de me suivre dans toutes mes galères et me laver les cheveux pendant que je bouquine allongée…)

Un confinement, dans le confinement. Pendant que le monde trépignait de pouvoir sortir de chez lui, moi je trépignais de pouvoir sortir de mon lit.

Et depuis début avril, je revis. Je tiens debout, je marche, je peux m’asseoir… Bon, c’est complètement YOLO car je n’ai pas de suivi post-opératoire et je n’ai pas de rééducation deux fois par semaine comme je devrais… MAIS je ne souffre pas pour la première fois depuis novembre 2018. Et je vous jure que je reviens de loin.
Là, le monde n’attend plus que je le parcoure en pas chassés… MAIS ON EST TOUJOURS CONFINÉS !
J’étais persuadée que si l’opération était un succès, j’aurais une crise d’hyperactivité, à sortir partout et reprendre toutes mes activités en même temps… Mais l’univers a décidé que non, je suis donc toujours en pyjama deux jours sur trois, à tuer le temps sans voir personne.
Quand ça veut pas, ça veut pas.

En ça, le confinement n’a pas changé grand chose à ce qu’était devenu ma vie donc si ce n’est une frustration de pas pouvoir profiter du dehors alors que je suis ENFIN sur la voie de la bonne santé, je peux pas dire que mon monde s’écroule non plus. C’est juste une prolongation de ce mode de vie un peu isolé.
Sauf que cette fois, j’ai aussi beaucoup moins de travail qu’avant, et pour la première fois en cinq ans à toujours avoir la tête dans le guidon, j’ai le temps de m’occuper un peu de moi. Et franchement, si on oublie l’impact financier, ce petit frein dans mon mode de vie bourreau de travail me fait un bien fou. Je peux enfin prendre le temps de réfléchir à mes projets futurs, à ma carrière, à mes envies… Et aussi à ce blog.

Je ne vais pas vous mentir, j’ai passé de longs moments de réflexions à me demander ce qu’il allait devenir.
Est-ce que je l’abandonne ? Est-ce que je le reprends ?
Il y avait autant de pour que de contre.

★Le contre

Pour commencer, cela va faire cinq ans que j’ai un blocage d’écriture pour des raisons diverses.
→ Le premier, c’est le manque de temps. Depuis 2014-2015, je travaille énormément. Mon travail consiste principalement à traduire et écrire, et ces cinq dernières années, j’ai passé 50 à 80h par semaine sur mes fichiers à écrire, écrire et écrire comme un robot – et me taper tendinite sur tendinite.
Résultat quand j’ai terminé, je n’ai plus aucune envie d’être devant mon écran. J’ai envie de sortir, de voir des gens, de danser – quand je pouvais encore quoi – de me balader… Tout faire sauf écrire.
→ Le second blocage, je vous en parlais il y a quelques blogs, c’est mon manque d’anonymat. Avant j’écrivais sans qu’on me connaisse et je me sentais très libre d’écrire tout ce que je voulais. Aujourd’hui, beaucoup de lecteurs me connaissent d’une façon ou d’une autre, parfois même dans le milieu professionnel, et chaque blog faisait un peu parler de lui derrière (notamment les plus personnels, vous vous en doutez). Résultat, je me sentais bridée car je ne gérais pas toujours les retombées.
Bonne nouvelle : ce blocage a complètement disparu. Déjà en étant partie du Japon et en ne pouvant plus marcher, je ne côtoie plus grand monde depuis un moment. Et surtout, cette longue pause sur ce blog m’a permis de mettre beaucoup de distance dans ma tête et aujourd’hui je me fiche pas mal de ce qu’on peut dire et penser. Ça m’a pris plusieurs années, mais j’ai enfin dépassé ce souci, hourra !
→Troisième blocage, je trouve que tout ce que j’écris c’est de la merde. Mon critique intérieur est plus en forme que jamais et vient piétiner tout ce que je fais. Même là, ce que je viens d’écrire je me dis « Mais qui s’en soucie ? Mais pourquoi tu tartines tout ça, tout le monde s’en fout, ils veulent des drames, des plot twists et des blagues, eux ! » et vous n’êtes pas à l’abris que je ne poste jamais rien parce que je me serai dit qu’en fait, ça n’a aucun intérêt.

Au delà de mes blocages d’écriture, ce blog a une très longue histoire. Et comme dans chaque histoire, il y a des rebondissements et pas toujours des bons.
J’ai commencé ce blog il y a 12 ans. Et pendant plus de deux ans, il était destiné à deux trois fidèles amies, puis à ma famille, pour leur donner des nouvelles de moi depuis le Japon.
Et je ne sais pas quand ni comment, mais il a fini par être suivi par des centaines – et en 2013 même des milliers – de personnes.
A l’époque, il n’y avait pas vraiment de réseaux sociaux – on utilisait facebook pour indiquer à nos amis du CM2 qu’on avait pas revus depuis 20 ans qu’on avait mangé une pomme le matin et que Matéo avait enfin fait caca au pot -, il n’y avait donc pas de vague d’influenceurs et de chasse aux likes.
Ce blog est devenu populaire – à l’époque, car il ne reste plus que fidèles vétérans maintenant – sans que je ne fasse rien pour ça.
Et je n’avais pas l’éducation nécessaire pour savoir le gérer, alors bien souvent, j’ai laissé cette popularité et la relation avec les lecteurs me bouffer sans que je m’en rende compte.

J’ai mis le doigt dessus et l’ai réalisé il y a à peine quelques mois, en fait.

Je suis sur les réseaux une autrice/illustratrice qui a sorti un roman graphique absolument fantastique sur sa relation avec un manipulateur et comment ça l’avait détruite (Tant pis pour l’amour, de Sophie Lambda). J’ai adoré ce livre pour bien des raisons et l’autrice est très talentueuse et drôle, donc j’ai plaisir à suivre son instagram au quotidien, toujours très amusant et avec des dessins agréables et intelligents.
Et puis il y a quelques temps, elle a fait une story, disant peu ou proue « Je ferme mes DM, je n’en peux plus. Beaucoup viennent me dire qu’ils ont adoré ma BD et qu’ils se sont identifiés à mon histoire car ils ont eux-mêmes eu une relation avec un pervers-narcissique qui les a détruit. Et ils m’écrivent pour se confier à moi avec des détails souvent traumatisants de ce qui leur est arrivé. Moi aussi j’ai écris mon histoire, pour moi, pour m’en libérer, et je suis heureuse qu’on me lise et qu’on apprécie. Mais je ne peux pas lire toutes vos histoires. Vous, vous avez lu la mienne. Une seule. Moi j’en lis des dizaines par jour, des histoires de maltraitance, des histoires de viol, des histoires de violence, de tromperie. Toute la journée. Et je n’en peux plus, ça m’affecte beaucoup trop. Je n’ai plus la force psychologique d’affronter tous ces malheurs chaque jour, surtout que moi je ne peux rien faire pour vous. Alors je ferme mes DM. »
Et lire ça m’a vraiment percutée. Car à mon petit niveau, je me suis rendue compte que c’était exactement ce que j’avais vécu.
Après mon post sur les TCA, j’ai reçu des centaines et des centaines de témoignages quasiment aussi longs que le mien. Par commentaires sous l’article lui-même, mais les plus durs par emails.
Des choses vraiment horribles comme des personnes qui mangeaient du coton pour ne plus avoir faim, des personnes qui m’envoyaient leurs pesées chaque jour en me demandant ce que j’en pensais, des appels à l’aide de personnes désespérées qui mettaient leur vie en danger.
Et à l’époque, je me sentais responsable de toutes ces personnes. Parce qu’elles m’avaient lues, parce qu’elles m’accordaient leur confiance, parce que je suis quelqu’un qui déborde d’empathie – à un niveau maladif, vraiment – et que connaissant cette souffrance, je voulais absolument pouvoir alléger la leur d’une façon ou d’une autre.
Aujourd’hui, ça fait sept ans que j’ai écrit cet article, et pourtant, je reçois encore des appels à l’aide. Comment vous aider alors que moi ça m’a pris six ans et quatre ans de thérapie pour en sortir véritablement, et que je ne saurais même pas vous expliquer comment c’est – ENFIN – arrivé ?
Il y a quelques mois, j’ai reçu le message de quelqu’un appelant à l’aide pour une proche anorexique et me demandant de me déplacer pour aller la voir et lui parler, qu’on me paierait le prix des billets de train etc. Ça m’a vraiment mise mal car… Je ne me vois pas du tout prendre le train pour aller à l’autre bout de la France, rencontrer une jeune personne qui refuse le dialogue avec ses proches pour… lui dire quoi ? Chaque personne est différente, et surtout si elle n’est pas prête à affronter son problème, on ne peut rien faire pour elle. Cette personne avait besoin de recul sur elle-même, d’une envie de s’en sortir et de professionnels, pas de moi.
Mais la personne qui m’a écrite était évidemment désespérée et cherchait n’importe quelle solution… C’est terrible de dire non.
Evidemment, les messages de demande à l’aide pour se sortir d’une relation malsaine et consort sont aussi récurrents ces deux dernières années. Pour les maladies invisibles aussi. Mais c’est beaucoup de responsabilités de conseiller des gens qui parfois jouent leur vie sur quelques e-mails, sans connaître toute la situation, sans savoir vraiment ce qu’on fait…
Et je me suis vraiment laissée bouffer par ça. Réfléchir à des réponses qui aident, apporter mon soutien parce que même inconnue, cette personne se tournait vers moi… Au point que ces deux dernières années, j’ai l’impression d’être devenue l’espèce de psy de nombreux inconnus qui m’écrivent régulièrement pour uniquement me parler de leurs problèmes.
J’ai toujours répondu avec bonne volonté parce que pour moi, c’est impensable de laisser une personne en détresse dans sa solitude. Mais je ne vais pas mentir, à force, ça a beaucoup pesé sur mon moral. Parce que ce n’était pas une personne de temps en temps, mais des messages réguliers de plusieurs dizaines de personnes qui venaient vider leur sac à désespoir chez moi.
Et j’ai réalisé seulement il y a peu, grâce à cette story et l’opinion assez tranchée d’une amie influenceuse, qu’en fait… J’étais pas là pour vous sauver. Je suis heureuse quand mon blog peut vous aider d’une façon ou d’une autre à prendre votre vie en main, mais les choses doivent venir de vous, moi je ne dois rien à personne.
Je ne suis pas psy. Je ne suis pas médecin.
Je suis juste quelqu’un qui écrit ses tranches de vie sur internet, des fois drôles, des fois moins drôles. Et j’aime les échanges avec vous, c’est aussi en grande partie la raison pour laquelle je le fais.
Mais je ne peux pas aller intervenir auprès de vos proches malades, je ne peux pas venir vous sauver d’un mec taré, je peux pas devenir votre amie en trois messages, parce que si vous, vous avez l’impression de bien me connaître car vous me lisez depuis X années, moi je ne vous connais pas.
Et ça m’a pris des années, mais je prends enfin conscience que non, je ne vous dois rien et ce n’est pas mon rôle de vous sauver, même quand vous m’avez choisie comme oreille attentive.
D’ailleurs, la majorité des lecteurs me lisent et ne m’écrivent jamais, même quand ils ont lu des confessions difficiles de ma part. Ils ne se sentent pas l’obligation de me sauver parce qu’ils ont lu ma vie, donc je ne devrais pas sentir l’obligation de le faire quand vous me livrez la vôtre.
Je peux vous soutenir avec quelques mots comme vous me soutenez, mais c’est tout.
Moi, quand j’ai lu ce livre sur sa relation toxique, j’ai écris à l’auteur pour lui dire merci pour son travail, pour faire l’éloge de la finesse et de la générosité de son livre qui était d’utilité publique et lui souhaiter tout le bonheur du monde, mais pas pour lui raconter en détails ce qui m’était arrivé et lui demander quoi faire pour m’en remettre. Ça ne m’est même pas venu à l’esprit, parce que je sais bien que ce n’est pas son rôle.
Alors quand elle a écrit ce message pour dire qu’elle se sentait dépassée de ce qu’on attendait d’elle, je me suis rendue compte que je vivais exactement la même chose à mon échelle à moi, et que oui, ce n’est pas normal qu’on vous déballe tout et qu’on attende de vous quelque chose.

Même là, ça me coûte d’écrire ça. J’ai déjà envie de rassurer tout le monde en disant « mais non, ne te sens pas visé pour ce que j’écris, t’inquiète ! », car j’ai peur de faire du mal.
Surtout que je sais que personne n’avait de mauvaises intentions et une part de moi est toujours flattée qu’on me considère digne de confidences.
Mais c’est vrai que je n’ai jamais su mettre de limite dans cette relation entre mes lecteurs et moi, et je pense que j’aurais dû. Aujourd’hui, ces dérives sont connues et on voit souvent des créateurs de contenu mettre les points sur les i avec leur communauté et leur rappeler qu’ils ne sont pas amis. Mais il y a dix ans, les limites étaient plus floues et je me suis laissée dépasser.

Avant, j’étais toujours flattée quand on demandait à me rencontrer, ou à devenir mon amie, et j’ouvrais grand les bras. Et ça m’a valu quelques claques dans la tronche après coup.
Car tout le monde n’est pas bienveillant, et surtout, tout le monde s’est déjà fait une image très précise de qui je suis en me lisant. Et parfois, je ne suis pas comme vous l’aviez imaginé et ça vous déçoit.
J’ai ouvert la porte à de nombreux lecteurs qui souhaitaient me connaître en vrai. J’ai présenté mon cercle d’amis, j’ai donné des jobs à plusieurs personnes en galère au Japon, j’ai hébergé des gens… Pour que finalement tout se casse la gueule et que la personne me la fasse à l’envers à un moment donné. Ou alors l’amitié se termine mal car il y avait trop d’attentes et que je n’y ai pas répondu comme il fallait.
Des rencontres provoquées par ce blog qui se sont transformées en blessures. Certaines plus grosses que d’autres, mais dont la liste s’agrandit au fur et à mesure des années.
Donc je suis devenue méfiante – et un peu blasée. Je n’ai plus envie de m’investir émotionnellement. Je laisse souvent les invitations à se rencontrer sans suite, et en vrai ça me fait culpabiliser terriblement.
Mais j’apprends petit à petit, à mettre cette limite entre vous et moi pour me protéger. Et c’est compliqué, car je me dis que je vous frustre peut-être à ne pas me montrer aussi réceptive que vous l’espériez… Mais je dois apprendre.
Si je veux continuer à bloguer et vous divertir avec mes bêtises, il est impératif que j’apprenne à gérer ma relation avec vous, et la maintenir à une certaine distance pour ne pas me laisser happer.
Et mettre cette distance, ça veut dire me battre en permanence avec la peur de décevoir, la peur de blesser, la peur d’abandonner quelqu’un dans le besoin.

Rien qu’en écrivant ces lignes, je me dis « si ça se trouve, plus personne n’osera m’écrire après ça ou se sentira mal de m’avoir écrit avant » et ça me rend triste d’avance (la meuf qui ne sait pas ce qu’elle veut).
Mais assainir ce lien entre nous et me protéger est ma priorité. Comme vous l’avez sûrement compris depuis le temps, je suis quelqu’un d’hypersensible et une véritable éponge à émotions. Alors quand je laisse la porte ouverte à tout le monde, ça m’affecte bien trop profondément. Donc pour reprendre mes activités bloguesques, je me devais de rappeler ici que je ne suis pas psy, pas médecin, pas même votre amie, que j’ai mes propres galères à gérer et que je ne peux pas prendre sur mes épaules tout ce qui ne va pas dans vos vies.
Même si ça me coûte et me donne l’impression d’être quelqu’un de froid quand je dis ça.

Dernier argument qui pesait lourd dans mes contre la reprise du blog : mon humour.
J’ai un humour moqueur, exagéré, qui s’attaque à toutes les communautés et tous les pays où je vais.
Mais en 2020, est-ce que ce genre d’humour est encore acceptable ? En toute honnêteté, je me suis posée la question.
Ce n’est pas encore le débat « maintenant on ne peut plus rien dire », mais c’est juste une remise en question sincère de ma façon de faire rire.
Est-ce que toujours s’en prendre aux Japonais et les faire passer pour des abrutis, c’est raciste ? Pour le coup, je fais ça avec tout le monde, juste j’ai passé plus de temps chez eux, donc ils prennent plus que les autres. Mais est-ce une explication acceptable ?
Est-ce que me moquer de ci ou de ça, c’est valable parce que c’est au nom de l’humour ? J’aime l’humour piquant et acerbe (j’ai dans mes humoristes préférés Jeremy Ferrari et Pierre-Emmanuel Barré, donc bon, partant de là…).
J’en ai discuté en toute objectivité avec une amie, en lui disant « oui mais quand j’écris quelque chose de ce style, c’est pour rire », et elle m’a répondu « oui, mais c’est également l’argument de ceux qui disent des choses problématiques », et le fait est qu’elle avait raison.
Y’a quelques années, je me moquais dans un article d’une amie de l’école de japonais où j’allais qui portait une fausse frange et des lunettes sans verres. En 2010, c’était tellement détonnant, que ça me faisait rire.
Aujourd’hui quand je me relis, je me dis « mais meuf, elle fait ce qu’elle veut de son look, qu’est-ce que ça peut te faire ? ».
Je me suis pas mal relue, car on change beaucoup en 10 ans, et je n’ai pas tant trouvé de choses horribles et non assumables (bon je n’ai pas tout relu – que c’est long ces pavés ! – donc j’en ai peut-être loupé), mais le fait est qu’en 2020, la moindre phrase mal formulée peut mettre en colère de grosses communautés et blesser.
Et même si j’aime l’humour un peu acide, mon but c’est de ne faire aucun mal à personne, alors je me suis demandé si aujourd’hui, je pouvais encore faire rire sans taper sur les gens.
En même temps, je n’ai aucune envie de me censurer non plus et de dénaturer ma façon d’écrire.
Vaste débat.

Les pour

Malgré tout ce que j’ai dit plus haut, j’ai aussi eu de très belles rencontres grâce à ce blog. Mon meilleur ami depuis maintenant bientôt 9 ans m’a connu via ces pages et m’a tendu la main quand j’étais moi-même en galère, sans me connaître « en vrai ». Et aujourd’hui, il a le bonheur de supporter mon humour vaseux, ma mauvaise foi aux jeux vidéo et mes sautes d’humeur au quotidien depuis 2011. Il est mon frère de coeur, mon ange gardien, mon confident – parfois mon punching ball -, qu’on habite dans la même rue ou qu’on soit séparés par 10 000km, et jamais la vie ne l’aurait mis sur mon chemin sans ces petites pages de confidences.
Et puis certaines amitiés se sont faites au long terme, naturellement, via des petits échanges de messages simples sur plusieurs années et qui ont débouché sur des histoires sympa, sans me pomper l’énergie ou me demander plus que je n’ai à offrir. Des histoires où je ne regrette pas du tout d’avoir ouvert la porte.
D’autres ont des attentions vraiment trop mignonnes sans même me connaître. J’ai été opérée du dos en mars cette année, mais j’avais déjà subit une grosse opération en août 2019, et une fidèle lectrice m’avait envoyé un gros ballon avec un mot de rétablissement à ma sortie de l’hôpital qui m’a tout réchauffé le corazoncito.
Aussi, au concert à Paris de Miyavi, une lectrice m’a demandé la permission de venir me parler si elle m’y croisait – vraiment considéré de sa part – et quand ça a été le cas, ça a été une rencontre vraiment très émouvante, ponctué d’un gros câlin vraiment sincère. Une rencontre  sans pression, sans qu’on me demande de m’investir et de devenir la meilleure amie, et pourtant avec beaucoup d’amour. Ça m’a fait énormément de bien et si tu lis ces mots, encore merci d’être venue me faire ce coucou.

Sinon, comme vous l’avez remarqué, je suis quelqu’un de terriblement dur avec moi-même, qui excelle dans l’autodépréciation et le manque de confiance, alors recevoir des messages d’encouragements, de remerciements, des commentaires hilarants en retour à mes posts, ça fait toujours un bien fou. Surtout que j’ai une chance inouie : j’ai une communauté ultra bienveillante. Je n’ai quasiment jamais eu de haters, que des personnes compréhensives et respectueuses en commentaires, donc je ne vous dirai jamais assez merci pour ça.
Comme toujours, s’il y a du négatif dans ma façon de gérer mes relations avec les autres, il y a toujours énormément de positif, et vous êtes un boost incroyable.

Aussi, ce blog a un côté thérapeuthique. Il n’y a aucun doute sur le fait qu’écrire quelques confessions difficiles ici m’a permis d’avancer dans mon travail sur moi-même et d’aller de l’avant. Mais il a aussi également un côté « album souvenirs» qui est très rafraîchissant. J’ai relu dernièrement des trucs qui datent de 2010 ou 2011 et que j’avais complètement oubliés. J’ai trouvé vraiment précieux d’avoir écrit tout ça ici pour pouvoir me remémorer ces moments, et je n’ai vraiment pas envie que mes autres souvenirs se perdent car je ne les aurais pas écrits.
J’ai encore tant à vous partager sur mes aventures en Australie et ailleurs.

Enfin, le dernier argument, c’est que j’ai envie de renouer avec l’écriture « pour moi-même » et pas ce que je fais au quotidien pour le travail.
Après des années de blocage pour diverses raisons dont certaines évoquées ici, le travail que j’ai fait sur moi-même ces dernières années, certaines rencontres inspirantes ainsi que ce confinement et le précieux temps qu’il m’a offert m’a donné envie de reprendre.
Pas seulement ce blog d’ailleurs, mais reprendre l’écriture en général, sous toutes ses formes. Je ne vous cache pas que j’ai d’abord commencé par reprendre mes activités sur un autre site. Un blog qui n’a rien à voir avec celui-là, où je publie tout ce qui a trait à la culture : chroniques des livres que je lis, chroniques de films, séries et autres ; mais aussi écriture de fictions ou même de haiku (vous marrez pas !).
Je n’ai pas partagé ce site car… bizarrement, j’ai honte qu’on puisse lire les fictions que j’écris. En tous cas les personnes que je connais. Peut-être la peur de décevoir ou d’être jugée, encore une fois.
Je pense vraiment qu’une fiction peut en dire bien plus sur vous qu’un simple blog où on raconte seulement notre version d’une histoire. Pour l’instant je suis très active sur ce site-là, et je travaille sur plusieurs projets d’écriture que j’aimerais mettre en ligne plus tard.
Si certains sont vraiment intéressés de lire ce que j’écris sur ce site « jumeau » à sonyan.fr, dites-moi, et je verrai si finalement je partage ouvertement ou si je continue mes cachotteries.

Verdict

Réussir à reprendre activement mon site de chroniques et d’écriture, m’a finalement donné envie de reprendre également ce blog.
Je n’ai pas envie de mettre à la poubelle un blog avec douze ans d’histoire.
Mais justement parce qu’il avait une si longue histoire, avec des choses que j’aimerais oublier, avant de m’y remettre, j’avais besoin de faire table rase.

Pour commencer, j’ai effacé quelques posts. Rien de bien fou, je vous rassure. Comme je vous l’ai dit, au tout début, il n’était destiné qu’à deux trois personnes, et des articles où j’explique que j’ai mis 40 minutes pour manger mon bol de soupe de nouilles car je voulais écrire « Miyavi je t’aime » avec le petit alphabet n’a pas forcément grand intérêt… Donc tous les posts très vieux sans contenu, hop, dégagé.
Ensuite, il me fallait changer d’identité et changer de design. J’en avais marre du rose, marre de ce site au design complètement dépassé, marre d’Alice (même si j’adore toujours autant ce dessin animé !). Je voulais quelque chose qui ressemble plus à qui je suis aujourd’hui. Je ne sais toujours pas dessiner, alors j’ai fait comme j’ai pu pour gribouiller une nouvelle bannière à mon image, mais j’avais envie de mettre en avant mon côté vadrouilleuse maladroite, parce que les prochains blogs seront beaucoup plus dans cette veine. Et si j’ai dû annuler des voyages en Grèce ou au Mexique, quand le monde se sera relevé de la claque infligée par ce foutu virus, je compte bien voyager à nouveau.
J’en ai profité pour essayer de rendre la navigation plus claire, avec des listes de tous mes articles rangés par thème et par année (vous retrouverez tout dans les Sonyan VS Japon, Sonyan VS Corée, etc…).
J’ai également changé d’email pour me joindre, notamment car l’adresse que j’utilisais avant déconne à mort et beaucoup de mails reçus ne s’affichent pas.
J’ai viré l’espace newsletter car… Ce service était bien évidemment payant pour moi, et comme je n’ai pas renouvelé, j’ai tout perdu.
J’hésitais à faire une nouvelle newsletter qui regrouperait une fois par semaine ou par mois toutes les mises à jour sur mes deux sites… Mais est-ce qu’en 2020 les gens aiment encore les newsletter ? A vous de me le dire, sinon je continue via les réseaux sociaux.

Je me suis également demandé si j’avais encore des choses à vous dire, parce qu’annoncer son retour si on a rien à raconter, ça ne sert à rien. Alors j’ai réfléchi et je suis arrivée à une liste de 15 sujets ou anecdotes que j’avais envie d’aborder ce qui m’a paru satisfaisant. J’ai donc mon petit planning d’articles potentiels pour l’année en cours.

J’avais besoin de faire le point sur ma relation avec les lecteurs, ce qui est fait plus haut.
Ce qui ne m’empêchera pas les attentions ponctuelles que j’affectionne, comme les envois de cartes postales aux lecteurs qui le souhaitent pendant mes voyages, etc.

J’avais besoin de réfléchir à ma façon de rédiger et de faire rire. Je ne vais pas changer ma façon d’écrire, mais je ferai attention à ne rien écrire de vraiment offensant (ne pas choisir des insultes discriminantes par exemple) ou de mettre un disclaimer avant l’article pour préciser qu’il n’est pas sérieux. Par exemple, on m’a récemment reproché que mon manuel de la drague au Japon ne développait finalement pas le profil des mecs bien alors que c’est ce qui aurait été le plus intéressant, que ça dressait un portrait abominable des hommes Japonais et que ça n’aidait pas plus que ça à trouver quelqu’un… À l’époque il me semblait évident que ce n’était pas sérieux. Aujourd’hui, pour éviter tout malentendu, je pense que je préciserai qu’en aucun cas c’est un vrai manuel pour trouver un mec au Japon – vu mon passif, j’aurais pas la prétention de vous enseigner quoi que ce soit sur le sujet – et que ce post a juste un but humoristique, pour revenir avec autodérision sur nos fails d’étrangères au Japon, car manifestement ce n’est pas clair pour tout le monde.

Voilà, je pense que je vous ai tout dit.
En résumé, oui je vais reprendre ce blog !
Pour des notes plus légères, dans la veine de ce que j’écrivais il y a quelques années : des anecdotes foireuses, des sujets de sociétés improbables, des récits de voyage qui n’arrivent qu’à moi.
Je ne vous promets pas un blog par semaine comme à mon âge d’or, de toute façon entre temps vous avez tous vieilli aussi, vous bossez et/ou vous avez des gosses qui braillent et courent partout et n’avez pas le temps de lire des gros pavés régulièrement.
Mais peut-être au moins un par mois, à lire en douce au bureau le lundi matin pour bien commencer la semaine.

Je vais continuer le tri de mes photos de voyage, et de les publier sur mon instagram et mon second site.
Je vais continuer mes chroniques de livre et travailler sur mes fictions… Si ça intéresse des gens, levez la main.

Aussi, j’hésite depuis plusieurs mois à faire un podcast ou une chaîne youtube pour aborder – en légèreté toujours – la suite de mon combat avec mon corps. Je vois enfin le bout du tunnel de ce côté, mais j’ai pris des décisions drastiques pour ça et je pense que mon témoignage pourrait aider de nombreuses personnes qui ont décidé d’emprunter le même chemin. Or, je ne veux pas faire ça par écrit car ça nécessiterait beaucoup d’articles, alors j’hésite à me lancer dans un autre format… que je ne maîtrise pas encore.
Pareil, si ça vous intéresse, levez la main.

Et si vous avez des questions, réclamations, suggestions, je suis toute ouïe également.

Ce qui se passe dans le monde est une tragédie, mais à l’échelle de ma petite vie, ça m’aura au moins permis de faire le point sur beaucoup de choses et relancer ma créativité au point mort depuis bien trop longtemps, ce dont je suis reconnaissante.

Ça m’a aussi permis de réaliser – non sans dépit – que rien de ce que je faisais de ma vie n’aidait vraiment le monde.
Aussi, un grand merci à tous les indispensables qui se sont mis en danger ces deux derniers mois en continuant à aller bosser : soignants, caissiers, hommes et femmes de ménage, postiers, pompiers, agriculteurs, livreurs, routiers, employés d’administrations diverses, toute personne dans la chaîne d’approvisionnement de la nourriture et des produits de première nécessité.
Merci à tout ceux que j’oublie qui nous permis de continuer à vivre normalement dans tout ce merdier. Merci à tout ceux qui se portent volontaires, financièrement en faisant des dons ou en se rendant utile.
Vous êtes ceux qui redonnent foi en l’humanité.

Une pensée aux personnes qui ont perdu leur travail ou une partie de leur revenu, aux gérants d’un restaurant ou autre business mis à l’arrêt, pensée également aux personnes confinées seules ou dans des espaces réduits sans jardin, aux personnes malades qui ne bénéficient plus de leur suivi comme d’habitude, aux personnes fragiles psychologiquement qui se retrouvent confinées avec leur pire ennemi : elles-même, une pensée aux personnes dans une relation toxique qui se retrouvent confinée avec leur bourreau, une pensée à ceux qui ont perdu quelqu’un en cette période où on se retrouve séparé de ceux qu’on aime sans pouvoir les revoir, une pensée tout simplement à tout ceux impactés par ce qui arrive.

Un merci et une pensée à tout ceux que j’oublie.

Prenez soin de vous et de vos proches… Et on se dit à bientôt, pour de nouvelles anecdotes qui, j’espère, vous redonneront le sourire en ces temps étranges.

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