Vendredi 11 mars 2011

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Aujourd’hui, 11 mars 2012, cela fait pile un an que le grand séisme et tsunami qui s’en est suivi ont frappé le Japon et principalement la région Tôhoku.

J’étais à Tôkyô ce jour-là.

À par une peur terrible je n’ai rien eu, pas la moindre égratignure, mais voilà quand même mon histoire. Elle n’a rien de particulier, rien de plus que tout Tokyoïte ce jour là, je n’ai ni sauvé le monde, ni perdu toute ma vie. Mais aujourd’hui j’ai envie de la raconter.

Parce qu’il ne s’est pas passée une journée sans que j’y pense, parce que ma vie au Japon a changé depuis, parce que la vie au Japon tout court à changé depuis.

Et puis aussi, parce qu’il y a très peu de personnes qui savent vraiment comment s’est passée cette journée pour moi, et aujourd’hui, date de ce triste anniversaire, elle m’est revenue dans ses moindres détails, comme si je la vivais une deuxième fois.

Avec tous ces rats de médias qui cherchaient des expatriés à interviewer pour leur torchon à sensation et les curieux avides, je me suis refusée à écrire quoi que ce soit sur mon blog à ce moment-là sur le sujet et me suis contentée de faire la rigolote sur Facebook pour rassurer les proches.

Aujourd’hui, pour m’en souvenir, pour ma petite thérapie personnelle, je raconte comment je l’ai vu de mes petits yeux de niaise bisounours perdue au pays des sushis.

Je finis d’écrire ce billet bien tard, je ne me relis donc pas… pardonnez les fautes.

 9 mars 2011

 C’est mon avant-dernier jour à Tôkyô Galaxy, l’école de langue où je suivais les cours de business japanese. Après 15 mois à travailler mon japonais des affaires et autres avec eux, après des mois à chercher un travail pour pouvoir rester (je ne vous ai pas raconté cette partie de l’histoire mais ça viendra… c’est décousu dans le temps mais tant pis), après des mois à jongler entre les cours, le baito, le stage en entreprise et faire des journées de 14 h, c’est l’avant-dernier jour en classe.

Il est bientôt midi, les cours terminent à 12h40. Je regarde l’horloge, mi-pressée de partir (je viens de trouver mon nouveau travail et je dois passer à l’entreprise après), mi-nostalgique car ma vie étudiante prend fin après de longues années sur les bancs de l’école et que ce sont mes dernières heures de cours dans cette école que j’ai tant appréciée.

Et alors que le cours se poursuit sans pression, atmosphère de fin d’année, la terre gronde et les murs se mettent à trembler.

La routine, personne ne réagit, ou tout au plus l’habituel « tiens, un jishin » (jishin = tremblement de terre).

Sauf que cette fois il est long. Étrangement long.

Je n’aime pas les tremblements de terre, je n’ai jamais aimé ça. Généralement les Japonais attendent que ça passe, stoïques, et les étrangers s’en amusent.
Moi je blague dessus aussi pour dédramatiser mais ça m’a toujours fait peur. Parce que lors d’un de mes premiers voyages au Japon je suis allée au mémorial du tremblement de terre de 1995 de Kôbe et que ça m’avait bouleversé. Parce que la première fois que je suis partie un an étudier au Japon, c’était à Ôsaka et que la plupart de mes amis avaient vécu ce tremblement de terre et m’en avaient raconté des choses les plus horribles les unes que les autres. Parce que j’ai toujours détesté le directeur de la section de Japonais de mon université pour être un gros con de première, mais qu’il m’a touchée (et semblé pour la première fois humain) lorsqu’il nous a raconté les larmes aux yeux comment il avait été un des seuls survivants de son quartier lorsqu’il vivait à Kôbe à l’époque.
Bref, j’ai rencontré trop de gens ayant souffert et une peur terrible des tremblements de terre pour les prendre à la rigolade et je me suis toujours dit qu’en ayant choisi de vivre au Japon, un jour ce serait mon tour.
Sauf que je n’imaginais pas aussi tôt évidemment.

 

Donc voilà, comme je suis une déconneuse qui aime bien rire de tout, je déconne avec les autres sur le sujet, mais en vérité dès qu’un tremblement de terre se montre un peu plus long ou plus fort que la moyenne, j’ai mal au ventre et des frissons le long de la colonne. Je me demande s’il va dégénérer ou non.

Et ce jour-là, le 9 mars, il n’était pas fort mais tellement long que j’ai eu ce foutu frisson, ce malaise.

Les Chinoises assises devant moi commencent à pousser des petits cris, « il est bizarre celui-là sensei ! On ferait mieux de sortir ? »

 

Notre prof sourit, elle est sereine et nous dit que non, pour un comme ça, ça va aller.

Comme elle sent la moitié de la classe peu rassurée, elle interrompt son cours pour nous demander s’il y a des tremblements de terre dans notre pays et si nous connaissons les premiers gestes de survie.

Les trois quarts n’en ont strictement aucune idée et dans l’ensemble… moi non plus en fait.

Elle nous répond donc que la première chose à faire n’est pas de sortir dehors, au cas où les immeubles s’effondreraient.
Mais d’avant tout se protéger la tête (un casque, une casserole, n’importe quoi) et de se cacher sous une table ou un bureau. Même si tout venait à s’effondrer, la table et le casque nous protégeraient.
Ensuite, même si on ne sort pas dehors, ouvrir toutes les portes dont la porte d’entrée.

Pourquoi ? Parce que si l’immeuble ne s’effondre pas, le tremblement de terre peut déformer les cadres de portes, auquel cas une fois le tremblement de terre terminé vous vous retrouvez pris au piège sans pouvoir sortir.
Le plus dangereux dans un tremblement de terre n’étant pas forcément la secousse en elle-même, mais les fuites de gaz provoquant explosions et nombreux incendies, la première chose à vérifier est donc votre gazinière et s’assurer qu’il n’y a aucune fuite.
Prévoir des piles et de l’eau, car un gros tremblement peut être suivi de coupures d’électricité, et j’en passe.

Je prends note dans un coin de ma tête, me disant qu’un jour je devrais quand même aller dans les centres de simulations de tremblement de terre pour apprendre ces premiers gestes. Tous les Japonais font ses sorties éducatives depuis l’école primaire, mais moi je n’ai aucune idée.

Après ce petit interlude de dix minutes le cours reprend. Ma petite vie reprend et dans ma petite tête, l’idée d’un gros jishin est déjà bien loin.

 

11 mars 2011

On y est, ma vie à Tôkyô Galaxy se termine.

Les derniers cours ont eu lieu la veille, aujourd’hui c’est la remise des diplômes. Ma nouvelle boîte voulait que je travaille le jour même mais le boss a finalement décidé de me laisser la journée pour fêter ma remise de diplôme. (Et comme vous vous en doutez, j’ai vachement fêté ça…)

J’ai donc la journée devant moi, mon premier jour de congé depuis des mois.

La remise de diplôme ne se passe pas sans émotion, avec beaucoup de discours des professeurs, de certains élèves. Comme je suis une pleureuse née, je verse ma petite larme.

Je n’en reviens pas que c’est fini. Que je passe à la vie active, qu’une nouvelle vie m’attend.
Je suis à la fois excitée et heureuse d’enfin commencer à faire quelque chose de ma vie. Je remarque quand même avec une pointe de tristesse que je me suis fais peu (voire aucun ?) vrais amis dans cette école, et alors que tout le monde se prend dans les bras pour prendre des photos de groupe, se pleurnicher sur l’épaule et se promettre de se revoir, moi à part un ou deux collègues de classe, personne ne vient me parler.
Sauf cette chère Sumaï (dont je vous ai parlé plusieurs fois dans les blogs précédents), un peu comme moi, heureuse et nostalgique.

Je prends des photos avec elle et avec les quelques professeurs qui m’ont soutenue comme une vraie famille pendant ces 15 mois, qui m’ont aidé et supporté dans ma recherche de travail et donné de nombreux conseils. Ils ont été tellement gentils avec moi, ça me rend un peu triste de les quitter.

Bref, je n’ai peut-être pas réussi à me créer un super groupe d’amis comme la plupart, j’ai de bons souvenirs là-bas et serai éternellement reconnaissante au personnel de l’école pour m’avoir appuyée tous ces longs mois.

 

Après cette première matinée déjà forte en émotion, en adieu, en perspective de nouvelle vie et de tournage de page, je me retrouve un peu seule, livrée à moi-même.

OK, c’est ma première journée de libre depuis des mois, mais qu’est-ce que je pourrais faire ?

Le peu de gens que je connais ne sont pas libres…

Je décide d’aller dans un de mes restaurants préféré histoire de m’empâter encore un peu et célébrer avec moi-même ce nouveau virage dans ma vie.

Puis, terre à terre, je décide d’utiliser mon après-midi à bon escient en allant au bureau d’immigration chercher les formulaires à remplir pour ma demande de visa toujours pas déposée, et leur demander confirmation sur deux ou trois points pas très clairs et être sure de pas foirer ma demande.

 

Me voilà donc en route pour l’immigration. Je déteste aller à l’immigration car comme toutes administrations il y a du monde, il faut attendre des heures et en plus elle est un peu excentrée et on ne peut y aller qu’en bus. Savoir qu’à Tokyo, on ne prend quasiment que le train ou le métro donc prendre le bus c’est has been, lol

Puis ce bus est toujours plein à craquer … et pis même, j’aime pas les bus japonais, ils font vieux.

Mais bon bref, il faut ce qu’il faut, alors je préfère y aller et m’assurer de ce que je dois rendre, j’ai trop galéré pour trouver une entreprise qui accepte de m’embaucher alors que mon visa arrive à expiration pour faire ça à l’arrache (et je suis une angoissée de nature).

Je fais ma petite paperasse là-bas, on m’explique ce qui n’était pas clair pour moi et une fois que je sais tout ce que je dois apporter pour la prochaine fois, je sors du bâtiment pour rentrer chez moi et profiter enfin de cette journée de répit.

Il est 14h40 passés.

 

Je fais la queue à l’arrêt de bus avec tous les étrangers qui reviennent eux aussi de l’immigration, puis monte dans le bus qui démarre lentement.

 

Je suis posée la tête contre la vitre, pensive. Au début je ne remarque rien d’anormal mais je me sens bizarre, comme la tête qui tourne légèrement.
La sensation s’intensifie, je ne comprends pas : « Putain mais… il tangue le bus là, non ? ».
Oui, il tanguait. Doucement.
Les premières secondes, abrutie finie, je n’ai absolument pas pensé à un tremblement de terre. Je ne comprenais pas, française des banlieues que je suis, la première impression que j’ai eu était que des jeunes se balançaient pour faire tanguer le bus (chose complètement improbable au Japon…). Ou alors une grosse bourrasque ?

 

Et puis ça tangue de plus en plus, de plus en plus violemment, je regarde dehors et comprends. Ce n’est pas le bus qui tangue, c’est tout. Dehors les vitres des bâtiments semblent bouger, je vois les poteaux tanguer eux aussi, les camions sur la route à côté de moi, les barrières, tout. Tout bouge, tout tremble. Et là la première image qui m’a un peu choquée : une dizaine de gens sortant d’un bâtiment en courant, l’air manifestement apeuré.
Et je suppose que tout le monde a réagi à cette image, car là un connard a crié : « JISHIN !!!! » , et ça a été la panique générale dans le bus.
Et alors que le bus bougeait de plus en plus fort sur la route, les gens à l’intérieur se sont mis à crier et se précipiter sur la sortie pour tenter d’ouvrir la porte du bus encore en marche.

Et ça, c’est la deuxième image qui m’a terrorisée, voir ses gens se mettre à crier et se pousser comme si leur vie en dépendait pour sortir d’un bus encore en marche sur la route.
Je pense en toute honnêteté qu’être en voiture ou bus n’est pas dangereux (les roues amortissent les secousses) pour peu que l’on reste maître de soi et de son volant et que rien ne vous tombe dessus. Je tire donc ma révérence à ce chauffeur qui a gardé son sang-froid pendant que tout le monde crisait dans son bus, pour s’arrêter doucement sur le bas côté et faire sortir les gens qui s’agglutinaient et se poussaient les uns les autres.
Ce que je vous raconte là n’a duré en tout qu’une dizaine de secondes, mais en vérité j’ai cru que j’allais mourir. Quand j’ai vu les gens se précipiter en criant, paniquer alors que le bus valsait déjà pas mal sur la route, je me suis dit « mon Dieu, on va avoir un accident… ».
Mais non.
Le bus s’arrête et le chauffeur essaie de calmer les gens pour qu’ils sortent sans blesser un autre tant il se pousse.

Je pense en toute honnêteté que si le bus avait été rempli de Japonais ça ne se serait pas passé comme ça, ils n’auraient pas paniqué, ni cherché à descendre d’un bus en marche, ni poussé les autres.
Mais voilà, c’était le bus de l’immigration, il n’y avait que des étrangers dont certains venaient  à peine d’arriver au Japon, que des gens qui ne sont pas habitués aux tremblements de terre et ne savent pas réagir dans une telle situation.

Donc ça nous a donné quoi ? Un mouvement de panique.

Pour ma part,même si la panique ne m’a pas épargnée et que j’étais terrorisée en voyant la réaction des passagers plus les secousses allant crescendo, je n’ai pas bougé de mon siège. Je suis restée accrochée à la barre, jusqu’à ce que tout le monde soit descendu. Pousser tout le monde en criant « A MOIII ! » n’est pas mon style.

Une fois que la voie a été libre, je suis descendue et me suis mise sur le côté de la route et c’est là que je me suis rendue compte, que la partie commençait à peine.

Je commence à réaliser. Ça  y est, un tremblement de terre. Un vrai cette fois. Un gros. Celui que je me prépare psychologiquement à vivre, celui qui me fait peur (même si de ce qu’on nous en dit, le « Big One » reste encore à venir…)

Rien à voir avec les petites secousses d’ordinaire. Rien-à-voir.
Je comprends mieux le stoïcisme des Japonais  lors des tremblements de terre de tous les jours.

Je ne sais pas comment c’est possible, mais chaque seconde, les secousses semblaient devenir plus fortes. Autour de moi, tout semblait menacer de se casser la gueule, les camions à l’arrêt côte à côte s’entrechoquaient tellement ils tanguaiant, les câbles des poteaux claquaient dans l’air… Je regardais tout autour de moi, en me demandant si une de ces choses allait finalement me tomber sur le front ou non.

Et ce bruit. Ce grondement infernal qui s’élève de la terre, qui vous martèle le crâne, vous assourdit.

Arrivé à une certaine intensité, le sol tremblait tellement que j’ai senti mes jambes clouées au sol. Impossible d’avancer, de plier les genoux. La tête s’est mise à me tourner, ma vue s’est brouillée, je ne voyais plus rien, tout me montait à la tête, impression de m’évanouir. Je me suis dit que j’allais tomber alors tout ce que j’ai trouvé à faire, c’est m’accrocher à un des poteaux près de moi, les yeux fermés en attendant que ça passe, clouée au sol.

Ça n’a duré que quelques minutes, mais chaque seconde a duré une vie dans ma tête.

Et puis… le bruit s’est fait moins assourdissant, et si la tête continuait de me tourner comme après un tour de tourniquet, le tremblement s’est atténué, pour disparaître.

C’était fini.

J’ai ouvert les yeux, tous les étrangers passagers du bus étaient abasourdis sur le bas côté.
Deux jeunes Chinoises se sont mise à pleurer dans les bras l’une de l’autre, choquées.

Et c’est là que chouineuse que je suis j’ai craqué aussi et que je me suis mise à pleurer aussi.

J’avais eu tellement peur, bordel de Dieu. Pour la première fois de ma vie, j’ai vraiment pensé que j’allais mourir, d’un accident ou d’un truc qui me tomberait dessus.

Evidemment à par une envie de vomir tenace je n’avais strictement rien donc ça peut paraître bien ridicule de se mettre à pleurer ses mille morts pour ça, mais je sais pas… l’état de choc, l’évacuation de la trouille que j’avais eue. Donc voilà, j’ai craqué complètement, je me suis mise à pleurer de manière incontrôlable, franchement j’en avais même honte.

Depuis que j’étais au Japon, à chaque tremblement de terre ridicule n’ayant fait aucun dégât mais ayant le malheur d’être relevé aux infos françaises, j’avais pour habitude de recevoir un message inquiet de ma pauvre maman me demandant si c’était chez moi et si j’allais bien.

Je n’avais évidemment AUCUNE idée de l’ampleur que ça prendrait, AUCUNE idée du nombre incroyable de victimes et de toute la suite. Mais j’ai bien été persuadée qu’il y aurait quand même des morts et que d’une puissance pareille, il serait signalé aux infos françaises. Alors dans le doute, la première chose que j’ai faite a été de téléphoner en France à ma mère.

Je ne sais pas si se faire réveiller tôt le matin par le coup de fil de votre fille en pleurs à l’autre bout du monde vous racontant qu’elle avait cru mourir mais que tout allait bien fût bien rassurant, mais au moins quand ma mère a allumé la télé ce jour-là, elle savait que j’étais entière.

Et j’ai bien fait, car quelques minutes après, les téléphones ont été coupés et il a été impossible à qui que ce soit d’appeler sa famille ou proches pour savoir comment ils allaient.

Je crois que si je n’avais pas appelé ma mère à ce moment-là, même en état de choc et pleurant comme une pouilleuse pour lui dire que j’allais bien, elle aurait très mal vécu l’allumage de télé au réveil avec les images catastrophes passant en boucle sans pouvoir me joindre par la suite.

J’ai recu le mail d’une amie, « Tremblemeeeent de terrrreee ! Ha ha ha xD » et je venais d’avoir eu tellement peur et -même sans imaginer à quel point- j’étais tellement sure qu’il ne serait pas sans séquelle… que sur le coup le message m’a énervée et je n’ai pas répondu.

Mais avec du recul, je crois qu’il y a mille et une façons de vivre un tremblement de terre selon où et avec qui on se trouve. En sous-sol, dans une galerie de métro, on peut ne pas le sentir.

En haut d’une tour, c’est amplifié et insupportable.

On peut être tranquille chez soi, avoir peur, attendre que ça passe, puis… retourner tranquillement dans son salon sans voir l’anarchie dans les rues.

On peut être avec des amis dans un game center ou karaoke ou que sais-je, en rire et ne pas sentir à quel point il était intense.
Tout dépend vraiment d’où on se trouve et à quelle hauteur. Moi j’étais dans un véhicule (donc qui secoue bien), seule, et avec des gens qui ont créé un petit mouvement de panique. Résultat, la peur de ma vie.

D’autres l’ont nettement mieux vécu et n’ont pas eu le recul tout de suite ni compris vraiment que ce qui s’était passé était grave.
Donc je ne tiens pas vraiment rigueur à ceux qui en ont ri ce jour là en pensant que c’était rien, mais sur le coup… je l’ai mal pris et ignoré.

 

Après un moment resté l’air hagard sur le bord de la route, le chauffeur de bus nous fait signe qu’il peut nous ramener jusqu’à la gare. Je n’ai aucune envie de remonter dans ce bus mais bon, la gare n’est pas si loin et on ne va pas rester au milieu de nulle part.

 

Le chauffeur met la radio sur une chaîne d’information à fond pour qu’on puisse savoir de quoi il en retourne, mais à part qu’il vient d’y avoir un gros tremblement de terre, il ne se dit pas grand-chose.

Il nous ramène à la grande gare de Shinagawa tout en nous rassurant dans son micro, vraiment très professionnel.

Dans le bus, je constate que ça y est les téléphones ne marchent plus, j’essaie internet… c’est fastidieux mais ça fonctionne. Jeune fille de mon temps, je poste un statut pas trop alarmiste pour ne pas passer pour une chochotte mais pour quand même partager ma trouille, rassurer les troupes et garder un contact avec l’extérieur.

 

J’arrive donc à Shinagawa, et là… j’ai observé un Tokyo à deux vitesses.

C’était TRES étrange.

Il y avait des centaines de gens attroupés dehors, sur la place devant la gare et… les réactions semblaient passer d’un extrême à l’autre.

Si j’ai vu des gens qui manifestement avaient eu très peur comme moi, certains en pleurs, d’autres agrippés à leur téléphone en essayant vainement de joindre un proche, j’ai aussi vu des gens posés nonchalament en terrasse siroter un café ou faire leurs courses dans le centre commercial de la gare comme si de rien n’était.

Je pense aussi que c’est pour pour ça qu’on a un peu entendu tout et n’importe quoi sur le 11 mars à Tôkyô, des gens qui disaient que c’était rien du tout et que certains en faisaient trop, et d’autres complètement bouleversés, donnant des témoignages complètement contradictoires.

Chacun a, selon l’endroit et sa personnalité, vraiment vécu la chose à sa manière je crois.

J’avoue que pour ma part, je ne pourrai jamais comprendre ceux que j’ai vu faire du shopping dans le centre commercial comme s’il n’y avait strictement rien eu, ou encore ceux qui se posaient pour discuter et boire un verre.

Je n’aurai jamais ce « sang-froid ».

Bref, c’était donc un Tokyo à double personnalité que j’ai vu ce jour là, entre les gens choqués et ceux qui faisaient mine d’en avoir strictement rien à foutre.

 

Je me doutais qu’avec un tel tremblement de terre il n’y aurait pas de train, mais dans le doute, je rentre quand même dans la gare voit ce qu’il s’y passe.

Là je vois que toutes les lumières au plafond de la gare sont en train de se casser la gueule, à moitié détachée et certaines pendant dangereusement dans le vide. Les policiers ont établi un périmètre de sécurité et on ne peut passer que le long des murs pour ne pas se prendre des débris si jamais les lumières lâchent.

Ne romançons pas, ce n’est pas un paysage de désolation qui s’étend devant moi. Mais la gare de Shinagawa étant une des plus grandes de Tôkyô, voir le plafond et ses lumières qui s’effritent au-dessus de ma tête ne me rassurent pas vraiment.

Comme je m’y attends, il n’y a strictement aucun train, on nous interdit l’accès aux quais. Toutefois un écran est posté près de l’entrée où on composte les tickets et je me faufile dans la petite foule agglutinée pour voir ce qui se passe.

Les infos montrent des images d’incendies dans Tokyo et les alentours et préviennent d’une alerte au tsunami. Il ne s’est passé même pas 20 minutes depuis le tremblement de terre, LE tsunami n’a pas encore frappé Sendai, donc pour l’instant les images qui passent et qui me choquent pourtant déjà, on ne les reverra plus par la suite. Car elles ne sont même pas le centième de l’enfer qui va suivre sur les côtes du Tohoku dans quelques minutes.
Mais à ce moment-là, je n’en sais rien, personne n’en sait rien, et on est déjà tous bien assez choqués de ce qu’on voit.
 

Les gens continuent de s’accrocher désespérement à leur téléphone, je tente moi-même : ils ne marchent pas.

 

Pas de train, aucun bus n’allant chez moi, avec cette foule, impossible de prendre un taxi.

Je me dis bon, ok, on va attendre un moment dehors, il va bien se passer quelque chose.

Je retourne sur la place devant la gare où des centaines de Japonais attendent dans le froid.

Puis ça recommence à tanguer, à trembler, putain de répliques qui commencent. Mon envie de vomir reprend, je me sens pas bien.

Je me mets là où rien n’est susceptible de me tomber dessus et j’attends. Seulement voilà, j’étais entourée de centaines de Japonais attendant comme moi, mais qui eux étaient en groupe, ils pouvaient dédramatiser, discuter. Moi j’étais seule comme un rat là au milieu, sans arriver à joindre personne.

Je suis là, sur ma place, j’attends. Et les répliques reprennent, ça tremble. Pas aussi fort certes, mais assez pour intensifier ma nausée. Et, je suppose la trouille aidant, j’ai commencé à avoir des douleurs aigûes dans le ventre, horribles.

Ayant la joie d’avoir cette merveilleuse maladie qu’est la rectocolite hémorragique (même le nom est merveilleux), je connais ce mal de bide mieux que personne. Moi qui ne suis plus malade et plutôt tranquille depuis quelques années, voilà qu’il faut que ça me prenne maintenant.

Les douleurs deviennent super fortes, puis ce mal de cœur qui m’oppresse, mes crampes commencent à se transformer en malaise. Je me dis qu’il faut que je trouve des toilettes rapidement car soit mes intestins vont me lâcher là au milieu, soit je vais tomber dans les pommes.

J’évite la gare et son plafond de Damoclès, merci bien, et je me dirige vers un centre commercial criant à tout azimut dans les enceintes que leur construction antisismique est reconnue par l’état comme une des plus sures de la ville et donc par conséquent que je ne risque pas de mourir chez eux.

Je rentre dans le centre commercial, le sol se remet à trembler une nouvelle fois. Je vois des gens faire leurs courses ce qui continue de me faire halluciner de cette journée de grand n’importe quoi et-

 

 

Je suis de nouveau sur la place, plus au même endroit que précédemment, mais complètement à l’opposé. Il y a de plus en plus de monde dehors, toujours coupé du monde et tout le monde est de plus en plus inquiet. Ça rigole un peu moins qu’avant.

À côté de moi il y a une Japonaise frigorifiée et un Américain qui tente de communiquer avec elle pour comprendre ce qui se passe, il ne parle pas un mot.

Bonne âme, je m’improvise interprète. Il revient de l’immigration lui aussi, mais il n’était pas dans le bus avec moi, il était encore dans le bâtiment quand c’est arrivé. Et selon ses dires, les gens ont autant paniqué là-bas que dans mon vieux bus moisi.

Trop content d’avoir trouvé quelqu’un qui comprend le japonais et un peu ce qui se passe, il ne me lâche plus. Il me dit qu’il est arrivé au Japon il y a quelques jours, que c’était son rêve et qu’il revient de l’immigration où on vient de lui délivrer un visa d’un an.

Mais que ce tremblement de terre l’angoisse et qu’il se demande s’il a bien fait de venir. Il ne semble en effet pas très à l’aise et pas très rassuré. J’essaie toutefois maladroitement de le réconforter en lui disant que ça n’arrive pas tous les jours et que celui-là était quand même exceptionnel.

 

Je ne le sens pas rassuré pour autant. Sachant qu’à ce moment-là on n’avait aucune idée, ni pour le tsunami, ni pour les dégats et ENCORE MOINS pour Fukushima, j’imagine que ce pauvre Américain n’a pas survécu à tant de drames d’un coup et a fait partie de ceux qui ont été surnommé les « flyjins », soient ceux qui sont rentrés dans leur pays après la catastrophe.

Il veut savoir à partir de quand il y aura des trains je me propose donc de repartir dans la gare et essayer de voir ce qu’ils annoncent, cela va faire 2h qu’on attend tous congelés dans le froid en attendant la suite.

Je retourne dans la gare mais la situation des loupiottes au plafond s’était empiré, une était tombée et il y’avait des débris partout parterre, ils étaient donc en train de faire évacuer la gare et la fermer complètement pour éviter toute blessure.
J’abandonne donc, et retrouve mon Américain en compagnie d’autres étrangers à qui il s’est accroché. Je leur dis qu’il y a peu de chances qu’on ait des trains de nouveau aujourd’hui, qu’ils ferment la gare et donc qu’ils devraient tenter de bouger ou au moins se mettre au chaud rapidement.

 

Pour ma part je ne sais toujours pas ce qui se passe dans le reste du Japon, mais j’ai vu les alertes au tsunami et la ligne de train qui me ramène chez moi passe à côté de la mer donc je suis bien persuadée que je n’aurai rien jusqu’au lendemain facile.

J’ai évidemment bien pensé au taxi, mais environ dix millions de Japonais avaient eu la même idée et la queue à la station de taxis rassemblait une foule digne d’un concert de Johnny au Parc des Princes.

J’ai donc eu la bonne idée d’abandonner très tôt et de tenter de rentrer à pied.

Par chance j’étais à environ quelques stations en train de chez moi, ça me paraissait faisable.

Je n’avais aucune idée ni du trajet (et à l’ époque pas encore d’iPhone ou quoi et de merveilleux GPS qui va avec) mais je me dis que c’est ça ou rien, au pire je suis les rails du train autant que faire se peut.

 

Je pense que si j’avais insisté et tenté d’attendre encore une remise en route des transports, j’aurais fini comme ces milliers de gens qu’on a vus aux infos et qui ont passé la nuit dehors dans le froid, tout cafés, karaoké ou netcafé étant complet.

 

Je me suis donc mise en marche, accédant par intermittence à Facebook (mais toujours pas de téléphone…) ce qui me permettait de discuter un peu aux gens en France et leur expliquer où j’en étais dans mes aventures mais je n’avais toujours aucune idée de ce qui se passait réellement.

 

Dehors, c’était l’exode. On était des centaines à marcher pour tenter de regagner notre home sweet home.

 

J’arrive à recevoir un message de ma mère, paniquée, qui me demande si j’habite près de la mer et où j’en suis.

Heuu… oui et non, je suis pas en bord de mer, je dois être à quelques kilomètres… ?

Toujours aussi paniquée, elle me répond que si j’habite près de la mer il ne faut surtout pas que j’y aille car tout est sous l’eau.

Sur le coup je ne comprends pas, ici tout semble normal.

Evidemment aujourd’hui ça peut paraître « comique », mais bon ma mère n’ayant aucune idée d’où se trouvent Sendai et autres, avait juste vu les images du tsunami provoqué par un tremblement de terre qu’elle savait que je venais de vivre. Donc sur le coup n’ayant aucune idée d’où il avait lieu, elle avait peur pour moi.

Et moi qui je comprends rien à sa panique, ne voyant aucune eau nul part. Je me reconnecte à Facebook où un contact au Japon m’annonce qu’il a vu à la télé que Odaïba (quartier au sud de Tôkyô) est inondé, ainsi qu’une partie de Disneyland Sea.

J’imagine que c’est de ça dont ma mère parle et complètement à côté de la plaque lui répond que tout va bien, que ce n’est pas très grave et que ce n’est pas si près de chez moi.

Pas rassurée, ma mère me répond que la vague engloutit tout sur des kilomètres et de faire attention.

Je me dis qu’on ne doit pas parler du même endroit et lui dis de déstresser, qu’où je suis tout va bien.

 

A forcer sur le peu de réseau pour tenter d’accéder à Internet, ma batterie me fait défaut et m’abandonne, je suis définitivement coupée du monde.

J’ai donc continué mon trajet à pied morose, avec le bruit des sirènes de pompier et ambulance en fond sonore.

Bonjour, je suis dans un blockbuster américain.

 

Bruit de sirène qui a continué pendant des semaines d’ailleurs, quasiment tous les jours j’entendais des alertes pour tout et rien. Le premier soir, vu les risques de fuites de gaz et incendies j’ai compris mais après moins. On m’a dit plus tard qu’une sorte de parano s’était un peu installée, notamment chez les personnes âgées qui appelaient pour tout et rien.

 

Pendant ma longue marche, j’ai été prise tout d’un coup d’une envie de pisser incontrôlable. Il fallait que je trouve des toil… Oh. Oh ?
Tout d’un coup ça me revient.
J’ai eu un début de crise de RCH quelques heures plus tôt sur la place, mon mal de ventre, etc… Qu’est-ce qu’il s’est passé ensuite ?

Aucune idée.
Je suis entrée dans le centre commercial et regardé, ahurie, les Japonais acheter des souvenirs en me disant « WHAT THE FUCK ? » puis j’ai regardé voir si je trouvais le panneau des toilettes et après… aucune idée.

J’étais à l’autre bout de la place avec l’Américain et la Japonaise frigorifiée.

Ce n’est pas grave mais sur le coup je me suis fait peur, le premier trou noir de ma vie.

Je ne sais pas si j’ai vraiment eu une crise au final, si je suis allée aux toilettes, ni quand je suis retournée sur la place.
Trou complet.
Pas un trou bien long, peut être un quart d’heure je ne sais pas ?
Mais le fait est que je n’ai aucune idée de ce que j’ai fait pendant ce laps de temps. Surement le choc, la fatigue, l’effet de mon début de malaise j’en sais rien, peu importe. Mais c’est le premier trou noir de ma vie et franchement ce n’est pas agréable du tout.
Bon rien de bien grave quand même, juste déroutant.

 

Après quelques heures de marche, j’arrive vers 21h ou 22h à la maison, je ne me souviens plus.

J’avais peur d’avoir oublié d’éteindre mon radiateur halogène (ce qui arrive parfois… auquel cas j’aurais retrouvé mon studio Charlie en cendres) mais je l’avais bien éteinds.

Moi qui posais aussi régulièrement mon ordi portable en équilibre sur ma télé, ce jour-là je l’avais laissé au sol. Ouf, sinon je lui disais adieu aussi.

 

Pour le reste… un puzzle tombé et à moitié défait, des bouquins, CDs et magazines tombés et éparpillés parterre mais si ce n’est un bordel monstre de choses tombées, rien de cassé.

J’ai eu de la chance.

 

J’ai posé mes affaires et mis ma télé sur ON.

Et là… je l’ai vu. Le tsunami. Ce qui faisait débloquer ma mère.

J’ai vu les images comme on se prend une énorme baffe dans la gueule. Je me suis effondrée et je me suis détestée.

J’avais honte, je me sentais conne et coupable, conne d’avoir eu autant peur pour ma pomme, d’avoir cru que j’allais crever alors qu’à par un vieux malaise de chochotte j’ai même pas eu une égratignure quand d’autres ont vu leur ville se faire rayer de la carte. Quelle conne nombriliste.

 

J’ai continué à faire bonne figure sur les réseaux sociaux pour ne pas alarmer inutilement les gens, mais une fois rentrée je me suis complètement effondrée.

J’ai passé une partie de la nuit sur skype à parler avec ma maman. Le reste à traîner sur le net et tourner en rond chez moi, incapable de dormir, frissonnant à chaque réplique et regardant les images immondes de la télé me laver le cerveau pour le mettre en miettes.

 

Je ne sais pas à quelle heure j’ai réussi à fermer l’œil, mais il faisait jour.

Je ne savais pas que quand je me réveillerais j’aurais une menace nucléaire en plus au-dessus de la tronche.

 

Aujourd’hui, ça a fait pile un an.

Pour dire la vérité, hier soir avant de dormir j’y ai pas mal pensé, résultat je n’ai pas beaucoup dormi et j’ai rêvé de tremblement de terre. Ça arrive de temps en temps.

Et ce matin, je suis allée travailler, j’ai rigolé avec mon élève, souri à mes collègues comme d’habitude, mais je me suis sentie oppressée, mal dans mes baskets.

Vous avez le droit de penser que j’en fais trop, mais je suis une émotive c’est comme ça. Chacun sa sensibilité, la mienne est à fleur de peau, voilà.

Après le travail je suis allée à une petite cérémonie en hommage aux victimes, pas envie de faire ma minute de silence seule, de me souvenir de ça toute seule.

Des minutes de silence j’en ai fais un paquet dans ma vie, à la mort de quelqu’un, pour le 11 septembre, et j’en passe.

Mais j’avoue que quand c’est pour un événement qu’on a vécu, qui vous a touché, qui vous a changé, d’un point de vue émotionnel ça surpasse tout.

Pendant cette minute, la moindre seconde de cette journée m’est revenue en tête, tout ce que j’ai ressenti, les images, les gens victimes et qui se battent tous les jours pour refaire leur vie et reconstruire leur pays.

Toute la merde autour de Fukushima. Les semaines qui ont suivi le tremblement de terre où j’ai vu absolument tous mes amis et connaissances quitter Tokyo pour rentrer en France ou s’éloigner à l’autre bout du Japon quand moi je suis restée toute seule ici, me bornant à continuer ma vie de tous les jours quand plus rien n’est normal, et ayant une petite voix au fond de moi qui se demandait pourquoi je me retrouvais toute seule.

Le fameux setsuden (économie d’électricité), la pénurie des magasins, le rationnement des bouteilles d’eau, le vide macabre dans Shibuya ou Shinjuku les 8 jours qui ont suivi le 11 mars, quartiers vides et à moitié plongés dans le noir. Les répliques. Tout le temps. Pendant des jours, des semaines, des mois.

Les reportages télé. La connerie des médias. La connerie des gens tout court.

Les dizaines de mails par jour, parfois de gens qui ne m’ont pas vu depuis dix ans pour me demander de rentrer. Ceux qui vous font culpabiliser en vous traitant d’égoïste car « vous ne pensez pas à vos parents qui s’inquiètent » (quand les-dits parents sont eux, au contraire, géniaux, respectent mon choix malgré l’inquiétude et n’en rajoutent pas). Les Japonais, amis ou commerçants, qui m’ont souri et remerciée d’être restée les premières semaines qui ont suivi la catastrophe. Les gens pour le nucléaire qui vous disent que tout va bien. Les gens semeurs de panique qui nous annoncent la fin du monde et leucémies pour tout le monde.

Les témoignages des gens qui étaient dans le Tohoku. Les drapeaux « GANBARE NIPPON » un peu partout. Les héros qui sont partis aider. Les belles histoires de sauvetage, d’amitié, d’entraide.

Tout.

Et surtout, une énorme pensée à ceux partis trop tôt, et leurs proches qui eux se battent encore pour vivre avec ça et refaire leur vie.

Tout a défilé dans ma tête aujourd’hui en version accélérée à 14h46.

Un an.

Association douteuse

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Roooh mes amis, j’ai mis trois mois à reposter (et en plus je vous arnaque car c’est un court, ma malhonnêteté est sans limite…), mais que voulez vous je sors tout juste d’un empoisonnement alimentaire. (C’est pas vrai hein, arrêtez de croire toutes mes counneries)

En effet v’la ti pas qu’au détour du rayon interdit des sucreries (où je ne devrais pas mettre les pieds mais un champ de force m’y oblige, on ne lutte pas contre la gravité que voulez-vous), je tombe sur la dernière mauvaise blague Meiji.
Je vous laisse découvrir en image :


Ce qui est marrant avec ce produit, c’est que non seulement quelqu’un a eu la très mauvaise idée de mélanger du chocolat avec de la tomate (je veux dire…si les tomates farcies au nutella ne font pas partie de notre patrimoine culinaire, c’est qu’il doit quand même bien y avoir une raison quelque part) mais en plus quelqu’un a validé le projet et dépensé des millions de yens pour que ce soit distribué à travers le pays (et ils ont réussi).
Notre société est formidable.

Et nous pauvre consommateur, on voit cette chose sur le rayon et même si ce n’est pas appétissant et bien on a pitié. Oui pitié mesdames et messieurs, de ces maîtres du mauvais goût qui ont sans aucun doute passé des centaines d’heures sup non payées à bosser sur ce fabuleux mélange.
Alors on a pitié, on se dévoue et on achète.

Pour la science aussi.

Je me suis donc sacrifiée pour toi lecteur, pour que tu saches la vérité, et suis passée à la caisse avec cette curiosité gustative dans les mains.

Contre toute attente, mon verdict est sans appel.
C’est infecte.

Mais je tenais toutefois à baisser mon chapeau bien bas à Meiji qui a réussi l’impossible : me faire ouvrir une boîte de chocolat et la refermer AUSSITÔT !

A quand le ferrero rocher à la carotte aux soirées de l’Ambassadeur ?

Sapin à la Japinoise

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N’ayant que très peu de temps pour moi et pour poster (bien que j’ai déjà choisi le thème du prochain pavé), j’inaugure donc aussi la catégorie Flash Post (qui devrait revenir régulièrement par manque de temps…) !

Depuis qu’Halloween est passé (dès le lendemain à vrai dire), c’est Noël au Japon !

L’occasion de voir des sapins plus originaux les uns que les autres !

Comme un sapin en peluches…




Ou encore plus balèse, un sapin fait en origami traditionnels de la grue…



Des motivés pour essayer… ?

Un peu de changement !

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Facile deux ans que je n’avais pas pris le temps (la peine ?) de changer le design du blog. Et puis voilà ça m’a pris comme une envie de pisser, j’ai eu envie de changement et au lieu de consacrer mon temps libre à vous écrire un post et avancer un peu dans le récit de mes trépidantes aventures, j’ai préféré reprendre tout le blog de zéro !
Voici donc la version 4, toujours en rose et toujours sur Alice, c’est la tradition, n’en déplaise.

Je ne suis pas encore 100% convaincue par cette version donc il n’est pas impossible qu’il y’ait encore deux trois couleurs qui changent (sauf cas de flemmite aigüe ce qui n’est pas impossible non plus) dans les jours qui suivent.

Pour vous y retrouver :
– Les catégories des articles se trouvent maintenant sur la barre horizontale sous la bannière, on survole et la liste défile.
– Ajout sur le côté de ma vidéo du moment, j’y mettrai selon mon envie/humeur du moment un clip ou vidéos diverses.

Et je pense me créer un deuxième compte Twitter spécialement consacré au blog (mises à jours, discussions avec vous les Gentils qui me lisez etc.).

Sur ce… il est temps que j’aille faire un dodo je vous dis donc bonne nuit, bonne journée ou bonne année selon votre fuseau horaire et à tout vite ! 

Back in the 50’s

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Comme annoncé sur la fanpage Facebook, j’inaugure une de mes nouvelles rubriques intitulée « Tranche de Vie » pour couper un peu des gros pavés retraçant mon parcours et vous parler aussi des petites choses de mon quotidien.

(Je vous prépare aussi la rubrique Flash Post – mini articles – qui viendra rendre ce blog un peu plus vivant quand je n’ai pas le temps de raconter ma trépidante vie).

Aujourd’hui j’ai envie de vous parler de quelque chose que j’ai trouvé aussi chiant qu’une messe un jour de Pâques pendant les trois quart de ma vie, mais que grâce à ma petite vie à Tokyo j’ai appris à apprécier…
Soit : les dimanches après midi.

Bon déjà au Japon on triche, puisque tout est ouvert.
Mais allez braver la foule en délire des plus grands quartiers tels que Shinjuku, Shibuya ou Ikebukuro, et très vite, vous vous rendrez compte qu’il vous faut 15min pour avancer de 2 mètres, tester 15 cafés avant d’en trouver un où il reste une demi place et faire la queue une demi-heure pour vous payer un collant bon marché… Donc à moins que cela ne vous rende nostalgique des lignes de queue du spacemountain à Disneyland, vous vous direz rapidement que faire du shopping un week end n’est pas forcément le plus judicieux si vous avez envie de déstresser de votre vie d’Amélie Nothomb au pays des sushis.

Soyons fleur bleue et rêvons d’espaces verts, ils sont assez peu nombreux à Tokyo pour en parler.
Je vais être on ne peut plus banale en vous proposant le parc de Yoyogi, soit le plus connu et le plus grand.
Un parc s’étendant à l’infini entre les deux quartiers d’jeuns de Shinjuku et Harajuku, avec en son centre un temple, de grand espaces verts, des points d’eau, des bancs…
Régulièrement ont lieu à côté du parc des festivals sur un pays ou une région proposant concerts, bouffe, et autres stands divers.
Les clubs de sport des universités viennent s’entrainer (si vous avez envie de mater discretos des mecs courrir en uniformes ou des filles faire les pompom girls, c’est donc faisable), des jeunes se regroupent pour jouer du djembe, faire du jonglage, pique niquer et j’en passe.

Vous pouvez vous même vous poser comme une merde dans l’herbe pour organiser une séance d’épilation/manicure entre filles…

…mais l’aventure ne se passe pas là.

Je vous propose de me suivre jusqu’à l’entrée du parc côté Harajuku, un peu après le pont connu pour accueillir les cosplayeurs et les personnes proposant des câlins gratuits avec leurs pancartes « free hugs ».
Avancez une centaine de mètres sur la gauche après le pont… et dès l’entrée… bienvenue dans l’Amérique des années 50.

Tous les clubs de Rockabilly de la ville se rejoignent sur cette place à l’entrée du parc, chaîne hifi et packs de bière sous le bras, une série de tubes qui vous ont fait danser ou danser vos parents en réserve.
Ils sont des dizaines et des dizaines, des John Travolta échappés de Grease, version japinois certes, mais tout y est : la gomina, la banane, les santiags, le jean noir et le perfecto.


Les femmes portent leur robes à pois sur des jupons qui tournent et tournent et feraient rêver n’importe quelle petite fille.

Ils sont là tous les dimanches, ils arrivent en début d’après midi, font péter le son et se déhanchent comme des malades jusqu’à la tombée de la nuit.

Et moi ils me vendent du rêve (à part peut être quand ils abusent sur la banane…).

Parce que déjà je suis fan des Etats-Unis des années 50-60, que la mode pin-up me donne envie de flinguer mon porte-feuille, que j’ai été élevée avec des films, certes cul-cul la praline, mais on ne peut plus cultes que Grease ou Cry Baby et que sous mes airs de fangirl j’écoute parfois autre chose que miyavi, et des maîtres comme le King Elvis et Johnny Cash font partie de ma playlist coup de coeur.
Je veux être une Pink Lady et lancer comme Rizzo « Allez les filles… à la chasse aux mecs ! », je veux des rouleaux dans mes cheveux, je veux du son sorti tout droit de Memphis, mélange de country, de rock n’roll et de Rythm & Blues, je veux ma bande avec leur veste de cuir noir et le nom brodés derrière.

Et quand je les vois, tous, ce rêve d’adolescente devient réalité, j’ai les années 50 sous les yeux et j’ai envie d’enfiler ma plus belle robe vintage pour m’incruster dans leur clan.


Si ils fascinent les touristes 5 minutes et font sourire les habitués, moi je peux les regarder pleine d’envie pendant des heures.
Un dimanche où je suis seule et que j’ai rien à faire ?
Je vais voir les Rockabilly.

Ils dansent en couple…

En cercles…

En choré…

 

Il y’a aussi ce groupe qui semble être le plus célèbre et qui sont là réellement à chaque fois, The Lebels.
Malheureusement… j’ai un gros doute sur le nom du groupe et me demande si c’est pas une erreur malheureuse récurrente des Japonais de mélanger le R et le L (qui se prononcent pareil) et qu’ils voulaient en fait s’appeler The Rebels… C’est dommage car leur perfecto claque, mais un nom qui veut rien dire imprimé dessus c’est balot…
On peut toutefois leur trouver des excuses en se disant qu’emmerder l’orthographe en écrivant Rebels avec un L est une attitude complètement rebelle, si si.

Celui qui semble être leur leader (avec le torse nu sous la veste de cuir) revient sur toutes les photos que j’ai pu voir sur internet parlant des rockabilly de Yoyogi, il est là chaque dimanche depuis maintenant plusieurs années.
J’avoue que petite coquine que je suis, je bloque – salive au coin de la bouche – sur son torse à chaque fois. Je ne sais pas quel âge a le bougre mais soyons sûr d’une chose… danser le rockabilly, ça conserve. D’ailleurs, mesdames je n’upload pas sur ce site des photos qui ne sont pas prises par moi mais si vous voulez aller vous rincer l’oeil sur le blog d’autres personnes, en parlant de torse des rockabilly de yoyogi on a aussi… ça… Je ne sais pas vous mais moi les dernières photos me laissent rêveuse… *yeux perdus dans le vague* Rah mais je m’égare, effrontée que je suis !

C’est Monsieur et Madame tout le monde, peut être ceux en costume la semaine qui m’énervent et qui puent dans le métro, qui me poussent pour avancer plus vite dans la gare, qui me regardent en coin à la caisse.
Mais le dimanche, ils sortent leurs habits de lumière des années 50, font revivre le vieux rêve d’une époque que je n’ai pas connu et je les remercie pour ça.
Qu’ils soient bons ou mauvais, que ce soit des Seniors revivant leurs jeunes années, ou des petits jeunes ayant bons goût, ils vivent leur truc à fond, prennent du plaisir à triper en rythme chaque dimanche et m’en donne à moi qui les regarde.

Bref, voilà mon occupation préférée des dimanches après midi désoeuvrés. Je rêve du moment où je pourrai y emmener ma maman quand elle viendra me voir (je ne désespère pas), je rêve du jour où je prendrai mon courage à deux mains pour aborder un des groupes et leur demander d’intégrer la bande et qu’ils m’apprennent à danser.
Peut être qu’un jour moi aussi j’aurai ma robe à volant, twisterai jusqu’à la tombée de la nuit et trinquerai d’une bonne bière fraîche à la fin de la journée.
(…et matterai ce torse musclé sec d’un peu plus près…)

Bref, Rock n’Roll and Greasers are not dead.

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